Cet album restera éternellement à part dans la carrière de METALLICA, première oeuvre sans Cliff Burton, disparu tragiquement en 1986 mais dont le fantôme plane bel et bien sur ce disque, et rupture avec les productions précédentes...

Avec ...And Justice For All METALLICA crache sa colère, sa révolte, sa rage que ce soit face aux horreurs de la société ou à l'injustice et l'ironie cruelle de la vie et de la mort...
Les jeunes adolescents boutonneux qui voulaient conquérir le monde ont ainsi laissé place à des adultes mûrs, privés de leur innocence et remplis de haine, prêts à dénoncer les errements de la justice, l'horreur de la guerre, les récupérations religieuses ou les catastrophes écologiques...
Certes ces thèmes ne sont pas nouveaux pour le groupe, mais la façon dont ils sont abordés révèle une évolution mentale et musicale impressionnante.
METALLICA a choisi de frapper fort, à travers les morceaux les plus complexes de sa carrière, qui illustrent parfaitement son état d'esprit, le summum de l'émotion étant atteint par le cultissime "One", son intro mélancolique, son break "mitraillette" et son solo dantesque...
On évoquera également l'hommage à Cliff Burton avec le dernier instrumental du groupe,encore le symbole d'une époque qui s'achève, et le pont mélodique qui arracherait presque des larmes, ou à l'inverse la colère brute sur le titre éponyme,oeuvre épique particulièrement engagée...

Bref ce chef d'oeuvre avait tout pour surpasser son prédecesseur, une qualité de composition ahurissante, des titres d'une profondeur et d'une violence rarement atteintes, ajoutez à cela ce qui restera pour moi la plus belle pochette du groupe voire l'une des plus réussies du milieu metal...

Helas une production indigne d'un tel travail vient gâcher le tout, un son qui donne une part bien trop importante à la batterie placée en avant, des guitares maladroitement mixées et une basse inaudible, symbole même du malaise d'un groupe à la personnalité si forte qu'il vire sans préavis son producteur pour rappeler en catastrophe Flemming Rasmussen (celui-ci déplorera le peu de temps et de moyens mis à sa disposition), et qui n'a pas fait le deuil de la disparition d'un être cher et hautement charismatique, réel leader musical et grand frère modèle, et en fait payer le prix fort à son nouveau membre en noyant ses traces pour mieux laisser résonner le vide laissé par son illustre et légendaire prédecesseur...