Le 1er décembre 1986 sort "Live Magic" le deuxième album Live de QUEEN (le premier – "Live Killers" – date déjà de sept ans). Le Magic Tour, tournée Européenne assurant la promotion de "A Kind Of Magic" a rempli les plus grands stades, réalisant même l’exploit d’organiser le premier concert Rock de cette envergure derrière le rideau de fer. QUEEN est devenu une machine énorme, ultra-médiatisée et ses shows sont devenus gigantesques. Comme le disait Freddie Mercury « plus ils sont nombreux, plus je suis content ! », Roger Taylor allant même jusqu’à déclarer : « Quand vous jouez devant de si grosses audiences, il est souvent plus difficile de jouer devant cinq mille personnes que cent mille. ». Voilà pour le décor. Le niveau de popularité des Anglais colle au pic du milieu des années quatre-vingt avec tout ce que cela implique (essor des clips, apparition de MTV, starification à outrance… ). Freddie Mercury hésitait à partir en tournée et la lassitude de l’enchaînement album/tournée se faisant sentir, QUEEN s’est davantage préparé à un grand show qu’à un enchaînement de chansons pour une tournée marathon et effectue moins de dates mais imposantes à chaque fois.

Ce Live est comme "Live Killers" une compilation de diverses dates et non un show complet. On y trouve quelques extraits du concert du 12 juillet 1986 à Wembley, à savoir "Is This The World We Created ?" et "Hammer To Fall" et du concert de Budapest le 27 juillet ("A Kind Of Magic" et "Under Pressure"). Les autres titres sont tous tirés du dernier concert du groupe (mais ça non plus personne ne le sait encore, même pas QUEEN) le 9 août à Knebworth. Si les quatre premiers sont aujourd’hui rendus caducs par les sorties du "Live At Wembley '86" et de "Hungarian Rhapsody", "Live Magic" garde un intérêt tout à fait historique car il permet d’écouter les dernières performances de la bande, notamment les cinq derniers titres de la face B extraits du concert de Knebworth, non tronqués et dans l’ordre où ils furent initialement joués.

Le problème principal vient du fait que le concert est largement amputé. Il suffit aujourd’hui de comparer "Live Magic" aux deux concerts complets extraits de la tournée aujourd’hui disponibles pour constater que l’intermède acoustique Rock And Roll a été zappé mais surtout d’immenses hymnes comme "Love Of My Life" ou "Crazy Little Thing Called Love" ont été retirés de la tracklist. Mais en plus de cela, certains morceaux ont été sauvagement édités. Et le travail de sape commence dès "Tie Your Mother Down" qui se voit amputée d’un couplet/refrain complet ! Quel dommage, surtout que Freddie Mercury s’y montrait particulièrement en voix (plus qu’à Wembley). D’une manière générale, les extraits du Knebworth sont du même niveau voire meilleurs que leurs homologues de Wembley (je pense à "Another One Bites The Dust" dont cette performance est la version Live la plus réjouissante que je connaisse de ce morceau, avec une joute vocale avec le public dantesque). Il faut dire que le groupe est à la dernière date de sa tournée et qu’il maîtrise son show sur le bout des doigts. Et même s’il n’est pas complet, quel plaisir d’écouter l’antique "Seven Seas Of Rhye". Assez transparent mais à noter aussi, "A Kind Of Magic" a été éditée de deux minutes. Au rayon des morceaux tronçonnés il y a "I Want To Break Free" dont l’intro a été purement et simplement supprimée, "Is This The World We Created?" carrément défigurée avec le collage effectué du premier couplet et du dernier refrain, et surtout "Bohemian Rhapsody" qui apparaît totalement live, le passage central, habituellement diffusé sur bande, ayant été supprimé au désespoir de nombreux fans, mais pas pour votre serviteur, l’intensité du Live restant palpable tout au long du morceau, ce qu’aucun autre enregistrement officiel de QUEEN ne permet d’apprécier. En outre l’harmonisation entre les pistes a vraiment été faite par des sagouins (en l'occurrence, QUEEN et Trip Khalaf, l'ingé-son Live). L’enchaînement entre "Another One Bites The Dust" et "I Want To Break Free" est un bon exemple de ce qui, en sus des éditions douteuses des morceaux, empêche l’auditeur d’écouter "Live Magic" comme un véritable Live, ce que "Live Killers" parvenait à faire avec plus de morceaux et plus de shows utilisés (à tel point que le groupe lui-même est toujours incapable aujourd’hui de dire de quelles prestations proviennent la plupart des enregistrements).

Rarement l’appréciation d’un album Live aura été autant sujette à caution tant le contexte a changé depuis le moment de sa sortie, quelques mois après la fin du Magic Tour. En 1986, je me serais sans doute rangé à l'avis général, à savoir que ce Live est bien décevant au regard de la popularité de QUEEN et de la puissance de feu que le groupe dégage sur scène. Il souffre inévitablement de la comparaison avec son aîné de sept ans. Les éditions pratiquées sur de nombreux titres sont également un peu pénibles, bien que ce ne soit pas sur "Bohemian Rhapsody" que cela me choque le plus. Et au vu de la production gigantesque que le groupe a déplacé sur cette tournée, on pouvait s’attendre à un show complet donc un généreux 2/5. Avec le recul, et pour le fan, je précise, le fait d’avoir la possibilité d’écouter ces documents audio extraits de la dernière performance du groupe est inestimable et bien que le show soit hyper rôdé (on pourra s’en rendre compte à l’écoute du "Live At Wembley" et de "Hungarian Rhapsody"), le feeling Live qui rend chaque prestation de QUEEN unique est bien là, malgré le hachage de la tracklist qui rompt la continuité du concert, l’enchaînement des trois premiers titres et des quatre derniers (soit les extraits du Knebworth) est sans faille on arriverait donc à 3/5. Ce qui nous donne une moyenne de 2,5/5 à une vache près.