Après un "Alive IV" qui a largement fait oublier un chapitre III de triste mémoire, loin de rendre hommage aux trésors de mélodie que KISS a su développer durant les années 80, il est temps de proposer autre chose. Et bien sûr cela commence par le retour d'Eric Singer derrière les fûts. Celui qui avait assuré le job pendant la maladie d'Eric Carr et qui lui avait succédé dans des circonstances forcément pas cool, est de retour au sein du groupe le plus chaud au monde : KISS ! Et son apport est déterminant ; son jeu punchy et son scénique sont une aubaine pour Paul et Gene.

Et pour solidifier sa nouvelle équipe, pourquoi se lancer dans l'aventure périlleuse d'un nouvel album, après le périlleux et décevant "Psycho Circus" et le camouflet de l'épisode "Carnival Of Souls" ? KISS est plus malin que ça et sait que sa réputation scénique est l'arme absolue qui peut susciter l'adhésion maximale. On peut dire que l'on n'aime pas KISS, mais il est impossible de ne pas admettre que le quartette américain met et a toujours mis tout le monde d'accord en live. Pour se faire, le public américain, pour qui KISS est depuis longtemps un trésor national devenu totalement mainstream, se verra récompenser par cette tournée 2004 qui voit le groupe se casser la tête pour sortir des setlists best-of.

Et rien que pour ça ce "Rock The Nation Live!" vaut carrément le coup. Entre exhumation d'antiquités (ce "She" au riff délicieux pour lequel Paul Stanley empoigne la double-manche, "Love Her All I Can", ou encore cet irrésistible "I Want You" en intro duquel il secoue les puces du public). Et la grande force de KISS est là : il excelle sur scène et au-delà de ses effets scéniques, pas aussi spectaculaires qu'à l'accoutumée, il envoie le bois grave ; c'est groovy, sauvage, et prend le contre-pied des Lives surproduits de la bande. Les jeux de voix sont une nouvelle fois une grande force, et d'ailleurs KISS dynamite la salle dès le premier titre, "Love Gun", où toutefois Paul Stanley ne se montre pas au top, là où le "Alive IV" était plutôt épatant. Malheureusement, cet étiolement se confirmera dans les années suivantes. Et on comprend notamment en écoutant les soundchecks que le groupe avait la capacité d'aller bien plus loin au niveau de ses choix de morceaux, mais il restait soucieux d'équilibrer avec des classiques.

Je dois dire que ce DVD est l'un des rares entrecoupés de séquences que je supporte (le "You Gotta Move" d'AEROSMITH est une horreur à cause de ça), et même si KISS ne peut pas inhiber une tendance à l'autocongratulation, son immense succès parle pour lui. "Rock The Nation Live!" était je trouve particulièrement utile et bien vu, car il remettait l'essentiel au centre du jeu : KISS est un putain de groupe de scène, et le décorum, poussé à son paroxysme sur les concerts australiens du "Alive IV" a eu un peu tendance à le faire oublier. KISS vieillit certes mais il assure toujours, pour peu qu'on supporte les costumes et les simagrées de Paul.