Des projets autour de Nostradamus, il y en a eu un certain nombre. Vous laissez faire Kamel Ouali et vous l’avez en comédie musicale avec Jul dans le rôle de l’astrologue. Le pire, c’est que ça pourrait passer à la postérité. Quand JUDAS PRIEST annonce qu’il va s’atteler à un double album sur le personnage, la nouvelle a eu de quoi surprendre. Parce que l’on n’imagine pas forcément très bien comment les Anglais allaient traiter le sujet avec leur Heavy Metal puissant et racé.

La réponse est simple : le groupe va reprendre sa marche en avant et se sublimer. Parce qu’"Angel Of Retribution", c’était bien sympa, mais c’était faire du neuf avec du vieux. "Painkiller" était le dernier album où JUDAS PRIEST se réinventait et il datait de 1990 ; "Jugulator" et "Demolition" ne faisaient que se laisser aller dans cette direction. Ici, la formation de Birmingham va aller bien plus loin. "Nostradamus" est ambitieux et on va voir le groupe se réinventer totalement.

Mais dire que JUDAS PRIEST vire Prog ou Sympho serait prendre un raccourci un peu rapide et qui, au final, est plus un détour qu’autre chose. Les musiciens ne jouent certes pas pied au plancher, ils prennent leur temps, ils construisent, les structures des morceaux sont plus complexes (et non, la complexité n'est pas toujours gage de Progressif dans la musique). Souvent, nous vivons des montées en puissance irrésistibles. Souvent, des interludes plus ou moins longs encadrent les titres et participent à l’ambiance générale qui se dégage de cet album.

Parlons-en justement de cette ambiance ! Elle est grandiose, tout simplement. Jamais JUDAS PRIEST n’avait sonné de façon aussi épique ni même aussi mélodieuse. C’est simple, ne serait-ce la voix de Rob Halford, on ne reconnaîtrait pas immédiatement le groupe et cela peut porter préjudice au PRIEST. Comprenez bien qu’il ne faut pas s’attendre à entrer dans une zone de confort, où l’on serait en terrain connu. Il n’y a pas de brûlots à la "Painkiller" ici, pas de montées vertigineuses dans des aigus inhumains. Pour autant, JUDAS PRIEST ne propose pas là un disque qui a l’âge des artères de Glenn Tipton ou KK Downing.

Il ne sonne en aucun cas daté, si ce n’est par quelques sonorités de clavier signées Don Airey (DEEP PURPLE) qui émaillent l’album sans être trop présentes non plus. Il vient apporter un certain liant entre les morceaux et les interludes. Puis il y a Rob Halford. Ce dernier livre une prestation de haute volée pour son âge (57 ans à la sortie de "Nostradamus" quand même, après des années à se déchirer la voix avec ses screams). Il est littéralement habité par ce qu’il chante, on ne l’a plus connu aussi impliqué dans son chant depuis longtemps et ça fait plaisir à entendre.

"Nostradamus" est peut-être bien le dernier classique que signera JUDAS PRIEST. Il faut du temps pour rentrer dedans, il faut persévérer. Il est long, ce double album, il demande beaucoup de concentration, il se mérite en somme. Et c’est aussi pour ça qu’il est indéniablement à écouter au moins une fois dans sa vie. Personnellement, ce n’est que dernièrement qu’il s’est révélé à mon oreille et depuis, il est en phase de figurer parmi mes albums préférés…