Vous vous levez le matin à la même heure, à la minute près. Le même bol de Nesquick, la radio en sourdine en se rasant. La douche salvatrice qui vous tire pour de bon des limbes du sommeil. Toujours le même train, ce wagon-là en particulier (pour être pile poil en face de la bonne sortie), gagner quelques secondes sur son trajet de ci de là (non pas cet escalator voyons !) pour arriver à l’heure. Ouf ! Une blague salace pour l’hôtesse d’accueil (as usual), le café dégueulasse du bureau en lisant ses mails. Un peu de papotage avec les collègues, puis la bouffe horrible de la cantine avec les mêmes collègues. Faut pas se plaindre, on a la « chance » d’avoir une cantine hein. Réunion soporifique l’après-midi (tiens j’avais pas vu cette option sur mon Blackberry). C’est fou ce que la journée passe vite en fait, j’ai eu le temps de rien faire. Même trajet chaotique pour le retour, tayaut il faut rentrer chez soi ! Ah oui, passer à Picard prendre une pizza (les « créatives » sont vachement bonnes quand même). Au chaud, surfing peinard sur quelques sites de cul pour décompresser. Une série à la con et au dodo. Demain la même journée m’attend.

…

Aussi rassurant qu’une couette rembourrée mais vide comme un sac plastique, sans doute ce qu’il y a de plus désespérant avec la routine. Le quotidien s’étire, prend un tour familier et les jours défilent comme un solo de Kerry KING. On ne voit rien venir et ça fait déjà 5 ans que vous habitez ici, que vous bossez dans cette boîte. C’est bien, maintenant vous êtes Cadre Moyen – Echelon 3 (catégorie 2) indice B1 : touché coulé.

On a tendance à croire que nos artistes chéris échappent à cela, que leur quotidien est extraordinaire, un quotidien fait de tournées géniales, de soirées homériques et d’échanges de fluides corporels avec les groupies. En ce sens, dans notre imaginaire, ils sont ces « super héros » qui mènent la vie rêvée pendant que nous on se tape les bouchons de la rocade.

Sauf que non.

Aucune vie n’est extraordinaire, la routine et ses malheurs rattrapent tout le monde. La vie « extraordinaire » n’existe pas par définition. Que ce soit aller au bureau, gratter son pain quotidien ou se prendre la tête en studio avec l’ingénieur du son qui capte rien ; que ce soit un « after work » avec les collègues au bar du coin ou une tournée de bières avec le groupe après un concert : quelle différence dans le fond ? Même répétitivité, des obligations, des pressions, des trucs plus ou moins chiants. Il est naturel d’idéaliser ceux que l’on aime, in extenso d’envier son prochain. Le gazon de la voisine semble toujours avoir meilleur goût, non ? Mais dans le fond, c’est pas un peu la même chose ? En vérité je vous le dis : presque du pareil au même.

"Pump Up the Valuum" est cet album du quotidien. Pondu sans trop réfléchir par un groupe qui a l’habitude, qui sait faire et peut faire de la musique comme il remplit sa déclaration d’impôt. Fondamentalement pas génial, diablement convenu mais juste pétri de savoir-faire. NOFX parle donc de drogues et de beuveries et fait ses délires habituelles (on connait), les titres courts s’enchaînent (comme d’hab’) avec à chaque fois un riff marquant et quelques idées de ci de là pour égayer la sauce. L’énergie est toujours là, mais plus diffuse pour un "Pump" - presque 100 % Hardcore - dont l’envie semble s’être émoussé. Même les quelques « hits » de l’album sont un peu moins « percutants », que ce soit "Dinosaur Will Die" ou "Bottles To The Ground", c’est sympa mais pas aussi décoiffant que n’importe quel titre de son prédécesseur.

Alors "Pump" prend des allures de « douche froide », une piqûre de rappel douloureuse de ce que le groupe peut avoir de banal et du caractère ennuyeux que le Hardcore peut revêtir quand il est joué « en mode automatique ». Nous sommes en 2000 et contrairement à la prophétie de "The Decline", le monde n’a pas explosé. Il faut donc continuer, remettre les couverts et faire avec. L’album a beau commencer avec le même bruitage qu’un certain "Linoleum" (rappelez-vous l’ouverture sur "Punk In Drublic"), il se situe à l’opposé en terme de motivation et d’inspiration. J’aime à me figurer que "Pump" a joué ce rôle de « déclencheur » nécessaire dans la carrière du groupe, obligeant la bande à Fat MIKE à un « avant / après » (montée en puissance de Fat Wreck Chords, des initiatives comme le fameux "7’Inch Of The Month", "Rock Against Bush", etc.). Rien ne prouve un tel lien de cause à effet, faisant de ma théorie une simple vue de l’esprit.

On dira simplement que "Pump" est un mauvais album de NOFX et puis basta.


Note : 2/5


Morceau préféré : "Dinosaur Will Die"
C’est pas mal quand même : "And Now For Something", "Take Two Placebos", "Bottles To The Ground", "Herojuana"
A redécouvrir : "Theme From A NOFX Album" (j’adore)