La seule critique que je peux vraiment comprendre à l'encontre de "Painkiller" a déjà été énoncée plusieurs fois sur ce site et je ne vais pas me priver de la réécrire. Ça vous apprendra à me lire, quelle drôle d'idée. Cet album on pourrait en effet lui reprocher d'être l'arbre qui cache la forêt, le muscle bodybuildé, sous stéroïdes, tendu dans cet effort absurde et surhumain qui masque l'humanité, la réalité, la multiplicité, la tangibilité du corps du PRIEST.

Comment expliquer "Sad Wings Of Destiny" à quelqu'un qui ne jure que par "Painkiller" ? Comment chanter "I'm Your Turbo Lover" et "The Wind Kissed Him Goodbye" avec un voisin dont l'esprit est habité 24h/24 par le refrain de "Hell Patrol" ?
Vous qui pensez cela et qui reprochez à cet album d'être l'aboutissement de cette quête de puissance, un aboutissement qui masque la richesse du voyage, des tâtonnements et des questionnements, des tours et des détours : sachez que je vous comprends et vous respecte. Seulement, nous avons bien souvent un désaccord fondamental.

Car ma tolérance pour ce besoin historiographique, cette critique du connaisseur, que dis-je, cette remarque de l’esthète, bref, ma compréhension de ce point s'effondre dès lors qu'il s'agit de nier l'excellence immaculée de "Painkiller". Qu'on en préfère un autre : c'est acceptable. Mais verser dans le négationnisme ? Mon sang ne fait qu'un tour, je vois rouge, je dois m’asseoir et boire un peu d'eau. On dirait vous quand je trouve "British Steel" bien sans plus.

Si l’exécution se suffit à elle-même, je crois bien que manquer la splendeur radiante du songwriting c'est à son tour être aveuglé par l'arbre qui cache la forêt, assourdi par l'ampleur de cette violence et de cette force. Reprenez vos esprits, buvez un peu d'eau vous aussi, baissez le volume s'il le faut. Derrière cette immense armure chromée et chatoyante il s'agit toujours du même corps, de la même chair, du même Halford, du PRIEST qui aligne tube sur tube, riff sur riff, refrain sur refrain. C'est toujours le vrai Heavy Metal derrière cette modernité – enfin modernité de 1990 hein on se comprend. Et comment pourrait-il en être autrement ? Ce Speed, ce Thrash, c'est JUDAS lui-même qui l'a enfanté.

Allez-vous me dire que la musique ne se lance pas automatiquement dans votre tête lorsque je dis – et j'aurais pu faire toutes les pistes – "STRAIGHT OUT OF HELL", "WITH A BURNING HEART" ou "YOU'RE POSSESSING ME" ? Que vous ne pouvez pas sur commande et de façon fort ridicule crachoter des riffs ou même des bouts de solos de cet album ? Alors nous ne sommes pas pareils et nous ne nous comprendrons finalement jamais. Restons-en là. Ces lignes sont gravées dans ma tête de façon plus profonde et indélébile que faire ses lacets ou manger avec des couverts. Et puis, imaginez que votre douzième album soit un album de la trempe de "Painkiller" ? Quelle classe quand même.