Fallait bien que ça arrive vous me direz, voilà donc que BLACK SABBATH se plante pour la première fois de sa carrière avec ce "Technical Ecstasy". Alors certes, on sait tous que l'ambiance n'était pas au beau fixe au sein du groupe mais de là à tout justifier... Après tout ça a toujours été un peu le bordel dans ce groupe donc bon... C'est quoi le problème au juste de cet album ? Pour moi c'est avant tout un problème d'ouverture musicale - elle est trop grande l'ouverture en question - conjuguée à une fatigue et une baisse à la fois d'inspiration et de lucidité.

BLACK SABBATH ne s'est jamais contenté de jouer des gros riffs bien lourds certes, mais ici il semble vouloir s'éloigner un peu trop de ses bases et révèle ainsi ses limites. Enfin, s'éloigner de ses bases, ça dépend comment on voit les choses. "All Moving Parts" est un titre qui sonne un peu comme un retour en arrière, vers un British Boom Blues peu original, et cela paraît banal en 1976, d'autant plus quand on s'appelle BLACK SABBATH. En fait le groupe se conforme, mais sérieusement, qui voulait de cela ??

BLACK SABBATH s'enfonce ainsi dans une véritable impasse : tout en conservant quelques aspects progressifs, le groupe aseptise sa musique, la rend quelque part plus simple d'accès (nettement moins Heavy) mais ne satisfera en aucun cas les adeptes de la vague Punk naissante ni ceux ne jurant que par le Prog.
Outre cette orientation musicale plus qu'hasardeuse, l'album trahit de toute façon une véritable baisse d'inspiration générale : on a vu beaucoup mieux chez Iommi que la banalité du riff de "Rock'N'Roll Doctor". "Gypsy", inventif, possède pas mal de passages intéressants mais malgré cela il est peu mémorable et ne marque pas vraiment les esprits. Si "It's Allright" n'est pas une daube absolue on reste bien loin de la qualité d'un "Changes", et puis Bill Ward au chant, franchement ??

Heureusement, BLACK SABBATH n'a pas perdu non plus toutes ses qualités de composition. "Dirty Women" est presque un grand titre du groupe, ça aurait pu être un classique, mais son final manque un peu de réussite. Le groupe parvient également à bien maîtriser ses arrangements : l'excellente ballade "She's Gone" en est un exemple magistral (très belle prestation d'Ozzy au passage), "You Won't Change Me", seul titre qui garde la noirceur d'antan, est également un grand moment. Enfin, "Back Streets Kids" assure une ouverture d'album accrocheuse, même si loin d'être mythique.

Donc pour résumer, "Technical Ecstasy" c'est surtout deux bons morceaux au début, deux bons morceaux à la fin, et entre eux un ventre mou qui a de quoi inquiéter. Certes, c'était une tâche difficile que de succéder à "Sabotage", mais on pouvait s'attendre à mieux quand même.