C'est vraiment étrange… Je me rends compte qu'autant l'excitation ressentie au moment d'écouter Floor Jansen prendre les rênes en live était au moins aussi intense que la fébrile attente de la sortie de "Once", autant je n'ai plus cette passion dévorante pour le groupe depuis quelques années maintenant. En effet, la musique de plus en plus ampoulée de Tuomas Holopainen peine de plus en plus à me séduire.

"Endless Forms Most Beautiful" ne m'aide pas, car la mignonette mais oubliable "Élan", à la mélodie téléphonée, tentant de refaire le coup de l'hymne instantané est un beau ratage. Les flûtes de Troy Donockley et la voix de Floor méritaient bien mieux. Le plus déroutant sur cet opus, et particulièrement lors des premières écoutes, c'est cette impression de voir Floor se retenir alors que sa puissance légendaire est l'une des forces sur lesquelles Tuomas aurait dû compter…

Mais voilà, Nuclear Blast a une nouvelle fois préservé la magie (ou échaudé les fans, question de point de vue), car NIGHTWISH nous revient Heavy, et presque old school par certains aspects. Les mélodies et arrangements de l'introductif "Shudder Before The Beautiful" évoquent même l'ère "Wishmaster". Les lignes de chant nous renvoient un lointain écho de l'époque où le groupe était encore 100% finlandais. Emppu voit sa guitare nettement revalorisée et dégage enfin autre chose que cet affreux son saturé froid et ultra compressé, même s'il n'est pas exempt de reproches, recyclant son riff de "Dark Chest Of Wonders" pendant "Yours Is An Empty Hope". Mais indiscutablement, le groupe a retrouvé du mordant et les "Weak Fantasy", "Shudder Before The Beautiful" font plaisir à entendre.

Et il y en a bien une qui devait tirer son épingle du jeu et c'est Floor. Tout en se fondant dans l'écriture de Tuomas, la valkyrie étale toute la palette (ou presque) de ses facultés. Du puissant et Rock au plus subtil et doucereux ("Our Decades In The Sun" - une franche réussite), à l'arraché et presque guttural ("Yours Is An Empty Hope", théâtre d'un duel vocal avec Marco Hietala où la plus grosse paire de roubignoles ne sera pas forcément attribuée à qui l'on croit), les voix de NIGHTWISH jouent sur une expressivité pudique que le mixage tend un peu à étouffer, mais pas suffisamment, heureusement, pour nous priver des plaisirs de "My Walden" ou de la pièce-titre. Le groupe propose même un très bel instrumental en sus, inspiré de la célèbre photographie de Steve McCurry.

Bref "Endless Forms Most Beautiful" se fait de plus en plus fascinant au fur et à mesure que l'on investigue sa tracklist pour révéler ses richesses aux plus enthousiastes, et ces derniers ne seront pas déçus, NIGHTWISH venant de surpasser ses deux précédents opus avec une élégance rare. On n'atteint pas encore la classe des chefs d'œuvre du groupe (entre autres à cause de cette pièce finale indigeste, loin d'égaler "The Poet And The Pendulum" ou "Song Of Myself" et de quelques longueurs – "Alpenglow"), mais ce NIGHTWISH revigoré est des plus prometteurs.