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NIGHTWISH - Decades: Live In Buenos Aires (2019)
Par JEFF KANJI le 23 Décembre 2019          Consultée 3637 fois

NIGTHTWISH et le Live c'est une grande histoire… Après avoir couvert avec Tarja Turunen par deux fois ces premiers disques (je ne compte pas "End Of Innocence" qui est un reportage avant tout, et dont la qualité des extraits live sont indignes, de l'aveu même de Tuomas), puis s'être montré d'un silence assez remarqué pendant la période Olzon, alors que ses shows devenaient de plus en plus imposants (un témoignage de la tournée "Imaginaerum" aurait sans doute été intéressant, mais on sait grâce au documentaire "Please Learn The Setlist In 48 Hours" qu'Anette Olzon a opposé un veto catégorique quant à l'exploitation de son image (pas forcément des plus brillantes, même si "Imaginaerum" lui donnait enfin l'occasion de faire la pleine démonstration de ses qualités). C'est une période difficile pour NIGHTWISH qui a failli se saborder lui-même en tournant de façon bien trop intensive pour assurer la promotion de "Dark Passion Play".

Mais ne perdons pas de vue que ce travail de fond a créé les conditions d'une séparation, mais aussi du succès international retentissant de la formation finlandaise qui depuis 2013 compte désormais un Anglais et une Hollandaise dans son effectif, communion que "Showtime, Storytime" a affirmé avec vigueur, et "Vehicle Of Spirit" pérennisé (peut-être avec trop de générosité). Ainsi c'est déjà la troisième offrande visuelle proposée par NIGHTWISH depuis l'intégration de ses deux nouveaux membres, qui a largement contribué à relancer une machine à l'histoire pour le moins agitée. Mais le groupe sait désormais se ménager des moments de pause, lui permettant de recharger ses batteries. Ainsi, le sextette refait surface en 2018 avec un best-of qui sert de base à une tournée-anniversaire qui s'est déroulée sur le reste de l'année, l'occasion de revisiter plus en profondeur un vaste répertoire pour la plus grande partie à l'abandon depuis "End Of An Era".

Seul petit hic au tableau : Jukka Nevelainen, qui avait dû céder la place à son pote Kai Hahto pour raisons de santé, ne reprendra finalement pas son poste, préférant se concentrer sur le business en coulisses. On l'aura vu reprendre les baguettes pour un petit "Last Ride Of The Day" en 2016, mais plus rien depuis… Kai Hahto a largement montré qu'il assurait le job en particulier sur les titres plus techniques à la "Stargazers". L'autre question légitime, mais à laquelle on a une partie de la réponse, est de savoir comment s'attaquer au répertoire de l'immense Tarja sans attiser chez les fans un sentiment de regret sinon de nostalgie. Pour cela on a Floor Jansen, grande fan de l'artiste qui a développé un sens de la nuance particulièrement poussé ses dernières années, au point de minimiser ses points forts, ce qui a notamment constitué l'une des frustrations de "Endless Forms Most Beautiful".

Et on commence avec des morceaux qui ne renient pas leur ADN mais qui sont interprétés par le NIGHTWISH d'aujourd'hui. C'est l'occasion d'écouter Troy Donockley inaugurer les débats avec un enchanteur "Swanheart" à la flûte, avant que le public de Buenos Aires (dont on se rappelle la ferveur sur la vidéo live de "Ghost Love Score" de 2012 qui a transcendé un groupe qui ne l'avait sans doute jamais autant été) ne prenne "End Of All Hope" en pleine face.

"Decades: Live In Buenos Aires" va montrer plusieurs choses : un groupe qui semble vivre la scène avec une sérénité et une complicité importants, un Troy Donockley qui a parfaitement pris sa place sur scène, une Floor qui retrouve toute sa mobilité et son élégance après une grossesse et des tenues d'extra-terrestre qui ne la mettaient pas en valeur sur "Vehicle Of Spirit" (en particulier sur le concert de Tampere), des vocalises opératiques notamment, qu'elle exploite de fait plus largement en revisitant une bonne portion de titres enregistrés à l'origine par Tarja. "End Of All Hope" affiche les prétentions de la belle avec vigueur, d'autant que son duo avec Marco Hietala fonctionne à merveille. Elle donne une nouvelle vie à des vieux classiques oubliés comme "Deep Silent Complete" ou "Dead Boy's Poem", une chanson extrêmement importante pour Tuomas qui l'avait écrite dans une période particulièrement compliquée.

Elle possède cette versatilité qui lui permet de respecter ce vieux répertoire tout en y incorporant ses propres qualités d'interprète ; c'est particulièrement vrai sur un "Wish I Had An Angel", "Elvenpath" que je n'aurais jamais espéré revoir sur les setlists, ou encore un "Devil & The Deep Dark Ocean" qui s'impose en morceau de bravoure du set avec "The Greatest Show On Earth" où Troy Donockley et Tuomas Holopainen se passent les plans de guitare joués à l'E-bow, et les parties de piano qui portent la signature du maître à penser de NIGHTWISH, le tout sur fond de vidéo et de lumières sacrément travaillées et immersives. Toutefois, l'inclusion de ce gros morceau à ce stade du set ne fait pas le même effet que sur "Vehicle Of Spirit" (en particulier sur le show en plein air de Tampere), d'autant que TOUS les autres titres, sorti de menues curiosités, sont de gros hits passés ou actuels du groupe ("Sacrament Of Wilderness", "I Want My Tears Back").

Le groupe est serein, cela se ressent jusque dans l'interprétation. Emppu ne se départit jamais de son sourire, et même Tuomas, si taciturne d'ordinaire, semble prendre beaucoup de plaisir, même s'il reste très concentré : il faut dire que tous les vieux titres ne bénéficiaient pas encore d'orchestrations symphoniques, ainsi il a beaucoup plus de responsabilités aux claviers, et son antique Korg N364 repeint en rouge (ça change à chaque tournée de toute façon) trône fièrement au sommet de sa config', nous régalant avec ce son de cordes si typique qui a façonné le son de sa créature de "Angels Fall First" à "Century Child". Hors cette espèce d'inertie, liée aux samples, a tendance à alimenter le côté "machine" du groupe, qui bénéficie d'une production colossale et d'une pyrotechnie prolixe, et qui est parfaitement rodé. Et cela ne joue pas en faveur des morceaux dont l'intensité dramatique reposait sur une implication maximale, et à ce jeu-là on peut clairement dire que ces réinterprétations de "10th Man Down" et de "The Carpenter" sont hélas un peu décevantes, au-delà du plaisir absolu de les retrouver (je me rappelle encore de ma réaction stupéfaite au Hellfest quand ils ont dégainé cet extrait de "Over The Hills And Far Away"), manquant de punch, en particulier "The Carpenter" pour laquelle le groupe a choisi une interprétation tout en douceur, le duo vocal Donockley/Jansen fonctionnant très bien par ailleurs. Là-dessus il faut bien le dire, nul n'arrive à la cheville de Tarja qui reste la seule capable de donner cette âme si particulière au premier single de NIGHTWISH et à l'inédit de 2001.

Des reproches qui ne peuvent pas occulter une prestation quasi sans faille (même si Marco s'oublie à un moment sur "The Kinslayer", remplaçant le peu qui lui restait à dire par un "Fuck me!" assez drôle, son regard complice avec Floor a su être capté par l'une des dix-neuf caméras chargées de retranscrire au mieux l'expérience visuelle. Et en parlant de Marco, c'est véritablement l'homme fort de NIGHTWISH, tout du moins sur scène : son charisme est indéniable, ses lignes de basse solides comme le roc, et ses prestations vocales sensationnelles. Que ce soit sur les morceaux les plus cool à la "Come Cover Me" ou les plus engagés ("Slaying The Dreamer"), tout semble facile pour le maître à penser de TAROT. En temps d'antenne, sans faire jeu égal avec Floor, il occupe une place prépondérante, car il est en plus très présent dans les chœurs en compagnie de Troy Donockley, dont l'accent anglais si délicieux et le timbre doucereux sont un renfort de poids.

Le NIGHTWISH de 2018 est toujours conquérant, mais il n'a plus rien à prouver. Il explore son propre univers et embrasse désormais l'ensemble de ses accomplissements, ce qui n'a pas toujours été le cas, notamment pour Tuomas. Une option de cadeau de Noël incontestable si vous ne vous êtes pas encore jetés sur le "United Alive" d'HELLOWEEN.

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   JEFF KANJI

 
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- Emppu Vuorinen (guitare)
- Kai Hathto (batterie)
- Tuomas Holopainen (claviers)
- Marco Hietala (basse, chant)
- Troy Donockley (uilleann pipes, whistles, bouzouki, chant, guitare)
- Floor Jansen (chant)


1. Swanheart (intro)
2. End Of All Hope
3. Wish I Had An Angel
4. 10th Man Down
5. Come Cover Me
6. Gethsemane
7. Elan
8. Sacrament Of Wilderness
9. Deep Silent Complete
10. Dead Boy's Poem
11. Elvenjig
12. Elvenpath
13. I Want My Tears Back
14. Amaranth
15. The Carpenter
16. The Kinslayer
17. Devil & The Deep Dark Ocean
18. Nemo
19. Slaying The Dreamer
20. The Greatest Show On Earth
21. Ghost Love Score



             



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