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MANILLA ROAD - Voyager (2008)
Par MEGATHERION le 8 Octobre 2008          Consultée 8127 fois

Fan inconditionnel de ce groupe culte, j'attendais avec un peu d'appréhension ce quatorzième album de Manilla Road. Après le véritable chef-d'œuvre qu'avait représenté pour moi l'exceptionnel « Gates of fire », était il possible pour le groupe de faire mieux, de relever encore la barre plus haut, tant le niveau semblait déjà élevé?

Depuis la sortie du précédent opus en 2005, il s'est passé pas mal de choses. Le groupe a eu l'insigne honneur de faire l'objet d'un tribute, véritable reconnaissance de son indéniable influence dans l'underground et de l'immense respect qu'il s'est vu reconnaître tout au long de sa carrière. Cependant, le bassiste Harvey Patrick, a du quitté le navire à cause d’affaires familiales, son frère Bryan a du faire de même, mais seulement temporairement. Par conséquent, aucun des deux n’a participé activement à l’élaboration de l’album. Mark Shelton et Corey Christner ont donc assumé la lourde tâche de mener à bien ce concept album. De plus, le groupe a perdu son label en cours de route, Black Lotus, disparu trop tôt pour raisons financières, alors que l’album était presque fini. D’ailleurs, insatisfait du résultat, Shelton retourna en studio pour le remixer entièrement. Finalement ce seront les Italiens de My Graveyard Productions qui reprendront le flambeau et sortiront l’album. Bref, « Voyager », n’a donc pas bénéficié de conditions optimales pour sa réalisation.

La trame principale de cette nouvelle oeuvre raconte l’épopée d’un groupe de vikings, au XIIème siècle, qui pour ne pas devoir se convertir à la religion chrétienne, acceptée par leur roi, s’en va à l’aventure et arrive sur les rivages du nouveau monde, en Amérique centrale. Là, ils rencontrent des indiens de la tribu des Toltec qui les prennent pour des incarnations divines, et ensemble, ils vont se tailler un royaume…


L’album commence avec un instrumental inquiétant, faisant penser à un drakkar qui erre sur une mer d’huile, perdu au beau milieu d'un brouillard épais et insondable. Une voix caverneuse et péremptoire résonne alors, bienveillante prière qu’Odin lui-même adresse à ses vikings égarés loin de leur base. Puis d’un coup « Butchers of the sea » commence...

Immédiatement, on est surpris par le son. La production fait volontairement « garage » et contraste fortement avec le début du morceau. Selon les dires de Shelton, l’homme a voulu faire un album plus lourd et plus sombre que le précédent, une sorte de retour au son en vigueur à l’époque de « Mystification ». D'ailleurs, un morceau comme « Conquest », pourrait sans problème figurer sur la track-list de cet album sorti initialement en 1987.
Il n'en demeure pas moins que la batterie sonne bizarrement (notamment la grosse caisse) et qu'elle semble plus étouffée que d’habitude. Certes, on me rétorquera que Manilla Road a toujours eu une production en deçà de ce que l’on aurait pu espérer pour un groupe de cette trempe, et d’habitude, cela ne me gêne pas outre mesure, mais là c'est un peu « too much ». Par moment, la section rythmique fait un peu bouillie sonore. Ceci dit, ce « Butchers of the sea » est tout de même très bon, et ceux qui affectionnaient cet aspect rugueux devraient l'apprécier aussi sur la deuxième partie de « Blood eagle » ou encore sur « Return of the serpent king ».

Au fil des écoutes émerge un autre élément frappant. On a parfois l'impression que la voix de Shelton semble fatiguée, comme s’il avait été difficile pour lui d’assumer l’album en entier au niveau chant. L’absence de Bryan Hellroadie Patrick se fait ici ressentir, surtout quand il faut forcer dans les aigus. Il est vrai que Mark a aussi un ancien problème au niveau des cordes vocales, et qu’il ne s’en est jamais totalement remis depuis. Il n’est plus question pour lui de pousser son organe comme avant. Cette impression se remarque notamment sur le titre éponyme de l’album, où ces manquements ressortent de façon évidente.

Mais heureusement, le guitar-hero de Wichita est toujours capable de décocher ses soli inimitables comme sur « Frost and Fire », ou encore « Tree of life ». Munissez le d'un clavier, et il vous sortira une grandiose intro comme sur « Blood eagle », d’inspiration « Bachienne », qui rappellera aux fans de la première heure des instrumentaux comme « Road to chaos » ou « Morbid Tabernacle ».
Il demeure un maître incontestable dans le domaine acoustique, comme sur le superbe et mélancolique « Tree of life » (encore lui), un des meilleurs morceaux de l'album, ou sur « Eye of the storm ». Pourtant, je ferai un autre reproche, plus mineur celui-là, à propos de cette chanson. Bien qu'excellente, je trouve qu’elle ne colle pas au concept de l’album. Elle sonne beaucoup plus comme un air du sud des States, et me semble inappropriée dans un concept orienté « viking ».

« Voyager » atteint son point culminant avec et surtout le magnifique « Totentanz ». Cette danse macabre bénéficie d'une fort belle intro à la guitare sèche, d'un riff qui tue, d'un refrain excellent, et d'un solo qui nous rappelle les meilleurs moments épiques du groupe.

Au final, l’album est bon mais souffre des quelques imperfections que j'ai mentionnées plus haut. Il possède sa propre personnalité, comme toutes les productions du Road, mais diffère vraiment de « Gates of Fire » et selon moi, il est tout de même loin de le valoir. Comme d'habitude, il nécessitera de nombreuses écoutes pour se l'approprier entièrement et je ne le conseillerais clairement pas comme premier album à écouter de Manilla Road. Son aspect rugueux fait qu'il est peu accessible à ceux qui ne connaitrait pas déjà le groupe. Je ne puis m'empêcher de penser que « Voyager » aurait pu être bien meilleur avec une production digne de ce nom et si Bryan Hellroadie Patrick avait pu participer au projet. Son énergie, son enthousiasme, sa rage parfois, font ici défaut. Mais, comme ce dernier est de retour au sein de la formation de Wichita, gageons que le prochain opus du groupe sera meilleur. Il paraît même qu'il sera très surprenant... Wait and see!

Note : 3,5/5

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- Mark -shark- Shelton (chant, guitare, claviers)
- Harvey -crow- Patrick (guitare, chœurs)
- Cory -hardcore- Christner (batterie)


1. Tomb Of The Serpent King / Butchers Of The Sea
2. Frost And Fire
3. Tree Of Life
4. Blood Eagle
5. Voyager
6. Eye Of The Storm
7. Return Of The Serpent King
8. Conquest
9. Totentanz (the Dance Of Death)



             



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