Après s'être remis d'une phase compliquée, notamment au niveau des égos, "Fear" ne réussissant pas à occulter le succès critique et commercial du premier (et resté seul) opus solo de DC Cooper, André Andersen, ne s'en laissant pas compter, concocte un concept-album, désormais séduit par les possibilités qu'offre le Metal Progressif. De quoi ne pas être forcément rassuré après un "Fear" que j'ai trouvé justement un peu froid et trop loin de ce que j'aimais chez les Danois.

Et pour faire monter la pression, occuper le terrain ou peut-être pour tout simplement confirmer l'orientation Prog de sa musique, ROYAL HUNT décide de faire patienter ses fans avec un EP, exclusif à plus d'un titre, car hormis une très recherchée édition de "The Mission", on ne retrouvera pas les deux inédits proposés ici.

Commençons donc par le titre qui donne son nom à l'EP. Déjà on peut être surpris de ne pas l'avoir en entier ce titre, puisque seule la "Part I" est présente ici. Il faudra attendre la sortie de "The Watchers" un an plus tard tout pile pour écouter en entier le titre le plus ambitieux produit jusqu'ici par les Danois. Il est tentant de penser que la version complète était envisagée pour figurer sur l'album, pas encore finalisé à ce moment-là. Pourquoi cela ne s'est pas fait ? Mystère. Toujours est-il que malgré cette frustration, car "Intervention" présente une approche intéressante, quoique trop dérangée par un bavardage musical un peu intempestif, avec un John West qui domine son sujet. C'est regrettable car cela nous prive de ces embardées finales absolument jouissives où Jacob Kjaer et André Andersen rivalisent de virtuosité avant que John West ne conclue les débats avec des screams stratosphériques du plus bel effet. Les futurs auditeurs de "The Watchers" s'en rendront bien compte.

"U-Turn" ne paraîtra pas non plus sur "The Mission", et pourtant il y a sur ce titre tenu par le piano volubile d'André, une mélodie inspirée qui rappelle les premières amours du combo, et qui n'aurait pas fait tache sur les deux premiers albums, voire sur "Moving Target". John West s'y révèle bien plus nuancé qu'on pourrait le croire, tant sa réputation de chanteur Heavy va le montrer sous son meilleur jour (ce sera encore plus vrai sur la consécration live "2006").

Par ailleurs, l'occasion de juger sur pièces nous est offerte sur ce "Intervention" avec les deux extraits live captés pendant la tournée "Fear" entre mai et août 2000. Et "Lies" pour inaugurer les débats, avec cette longue montée portée par des claviers qui savent installer l'ambiance et la faire grimper par crans, permet d'apprécier la régularité vocale de John, qui fait au moins autant honneur à la version studio, si ce n'est mieux. Mais on sera bien entendu curieux d'entendre sa prestation sur "Flight" ! Et il atteint là son plein potentiel, se révélant impérial sur ce type de morceau déjà entraînant à la base qu'il transforme presque en hymne Power Metal !

Mais histoire de montrer qu'il n'est pas doué que dans le chant Heavy, une relecture acoustique (ça aussi c'est une des marottes d'André Andersen) de "Follow Me", autre extrait de "Fear" qui deviendra l'un des titres-phare de ce ROYAL HUNT version West, vient le montrer sous un jour plus délicat, et il lui manque certes la chaleur d'un DC Cooper, mais cela n'en fait pour autant un interprète de moindre talent ; il insuffle son propre discours, comme le ferait un Zachary Stevens.