J'ai une tendresse toute particulière pour "Vile". J'en vois qui se marrent, là-bas, au fond, de lire le mot "tendresse" affublé à un album de CANNIBAL CORPSE. On tend vers l'oxymore, je le reconnais, mais je le confesse : c'est par le cinquième album studio des néo-Floridiens que j'ai découvert le groupe. Je suis devenu ami avec le Cadavre Cannibale après l'arrivée de George 'Corpsegrinder' Fisher. Et c'est plus précisément avec son interprétation féroce de "Devoured By Vermin" que le bonhomme sans cou m'a convaincu. Immédiatement. Il faut dire que ce morceau est l'un des tubes CANNIBALiens les plus ultimes qui soient : Top 5 de leur carrière sans hésiter. Ménageant le brutal - et même l'ultra brutal sur ses premières mesures - et un groove de folie, un riff insidieux des parties de gratte dissonantes bien techniques, il est plus qu'une carte de visite pour notre bon George : c'est le coup de boule qui accompagne les présentations.

Toutefois, "Devoured By Vermin" est symptomatique de ce qui cloche sur ce cinquième album studio des Américains. Il en montre trop. Trop tôt, trop vite et trop accrocheur pour la suite des morceaux. Oh, bien sûr, la première moitié du disque est presque aussi bonne que ne l'est le titre d'ouverture. L'hyper catchy "Mummified In Barbed Wire", avec son refrain taillé pour être repris par la foule en concert, est un plaisir à chaque écoute. Le groovy et presque dansant "Perverse Suffering" offre à Corpsegrinder le plaisir de rugir à loisir et ça fait du bien à entendre. Quant à "Disfigured", avec son riff que n'aurait pas renié un groupe de Groove Metal, il consacre l'efficacité du style CANNIBAL CORPSE même quand la brutalité n'est pas au rendez-vous. Car ce morceau est drôlement soft pour du Death Metal façon 'CANNIBOULE'.

C'est après que les choses se corsent. Car le disque devient inégal. "Puncture Wound Massacre" reste efficace. L'instrumental "Relentless Beating" porte bien son nom et passe tout seul. Et le revigorant "Orgasm Through Torture" permet de retrouver avec délice le penchant de CANNIBAL CORPSE pour le sexe vicieux. Le lourd "Bloodlands" aussi a quelques arguments pour lui, mais la deuxième moitié de "Vile" offre un niveau de qualité bien trop disparate pour emporter aussi franchement l'adhésion que ne l'avaient fait les deux précédents albums studio du combo. "Absolute Hatred" montre certes l'habileté technique de la paire Barrett/Owen mais on n'en retient rien. Quant à "Eaten From Inside" et "Monolith", c'est le tout-venant CANNIBALien, même si le premier affiche un visage plus Thrash que le reste du disque. "Vile" conserve néanmoins une qualité majeure : prouver que le Cadavre Cannibale peut conserver toute sa menace avec une autre voix.