« Tales From The Thousand Lakes », que voilà un album référentiel pour les amateurs de Death mélodique et atmosphérique, à consonance Doom ! On y retrouve tous les ingrédients qui font le charme du style et qui sauront ravir les papilles des connaisseurs : grosse voix bien Death, rythmes variés, majoritairement mid-tempo, claviers opportuns décorant la charge lourde des guitares bien puissantes, mais qui ne lésinent pas à nous offrir de superbes chorus et solos. Tout, je vous dis !

S'ouvrant sur la superbe partition instrumentale étoilée de "Thousand Lakes", véritable retranscription musicale de la somptueuse pochette ornant le livret du disque, « Tales From The Thousand Lakes » recèle pourtant pour moi une certaine interrogation : le groupe souhaite ici brosser une peinture de l'univers du grand nord, et pourtant quelques riffs parsemant les différentes compositions, tels celui de « Into Hiding », « Magic And Mayhem », « Drowned Maid » ou « The Castaway » m'évoquent surtout des paysages du Moyen-Orient, capturés par l'éclat blafard de la lune ! Bah, passons, ces titres sont de toute façon excellents, et il doit plus s'agir chez moi d'a priori et d'ignorance culturelle qu'autre chose !

Puissamment produit, « Tales From The Thousand Lakes » se veut donc une véritable manifestation de Death mélodique à son plus haut niveau, soigneusement agencé par de brillants et très jeunes compositeurs. Et ça fonctionne diablement bien : chaque titre fait mouche, séduisant l'oreille qui d'une mélodie bien pensée (les géniales « Drowned Maid » et « To Father's Cabin » par exemple, parmi tant d'autres), qui d'un riff mortel (« First Doom »), qui d'un solo à tomber par terre, débordant de feeling (« The Castaway »...), sans oublier les arrangements de claviers qui hissent le tout à un niveau supérieur, ainsi qu'en rend compte par exemple le magnifique « Black Winter Day », véritable titre phare du disque (et du groupe).

Cerise gelée sur le Fjord, cette formation finlandaise parvient sans peine à nous éblouir au travers de compositions concises mais relativement compliquées et qui, pour représentatives du genre qu'elles honorent de leur excellence, n'en sont pas moins vraiment personnelles (orgues Hammond, synthés diversifiés, guitares très vivantes), novatrices même (on note par exemple des chants clairs particuliers, voire un peu trafiqués, dont ARCTURUS et tant d'autres feront aussi usage), et scandées de breaks bienvenus autant que brillants. On pense souvent au THERION de « Lepaca Kliffoth » ou même de « Theli », en moins brûlant, mais ce serait néanmoins refuser de reconnaître la véritable personnalité d'AMORPHIS !

La formation finlandaise réussit ainsi là un bien beau tour de force en ne signant pas moins qu'un disque absolument référentiel et incontournable, qui fit un carton à l'époque, et dont toutes les compositions sans exception méritent l'attention, en dépit d'une production un peu rude. Une grande et belle surprise donc en cette année 1994, et une pierre massive à l'aune de laquelle auraient à se mesurer les apprentis artistes du Death mélodique Atmosphérique.