Wow, quel changement ! Bon, ce n'est pas comme si le groupe ne nous y avait pas préparé avec son politiquement engagé et un brin tribal "Chaos A.D." Les germes d'un retour aux racines nourricières, aux sources, était dans l'air pour les couillus Brésiliens. Et ce "Roots" est un vibrant hommage à la culture de leur pays, un porte-voix pour dénoncer les abus et carnages contre son peuple et sa nature. "Roots" est le plus cinglant des albums de SEPULTURA, autant musicalement qu'à l'écriture. Un opus créé sur le terrain, c'est le cas de le dire, sans compromis, organique comme jamais.

Premier choc : la gravité du son et la densité des guitares, plus grasses que jamais. Ça vibre, ça charcute, Max est en voix… L'emploi d'instruments traditionnels tels que le berimbau et les percussions tribales ajoutent à cette richesse inouïe des compos. Kisser troque aussi son arme pour une acoustique sur de nombreux passages lumineux, dont l'instrumentale "Jasco". Le rythme a beaucoup ralenti, les notes traînent et se laissent souvent dévorer en douceur, phénomène acquis sur "Chaos A.D.".

SEPULTURA n'a toutefois pas encore perdu son talent pour les refrains accrocheurs (les méchants "Straighthate" et "Roots Bloody Roots") ni son sens du riff sanglant. Ceux de "Attitude", "Spit", "Ratamahatta", "Dusted", "Ambush" et la violente "Dictatorshit", sont difficiles à manquer. Et que dire des basses, de la distorsion et de la production boueuse de "Roots" ?! Un trio qui galvanise un exercice de style passablement imagé et évocateur. Le contenu de la pochette est d'ailleurs fameux…

Autre et dernier souvenir impérissable de ce petit joyau : l'audace de la formation à s'enfoncer dans des morceaux torturés à la limite du Stoner. Je pense à "Lookaway" et "Endangered Species", qui prennent bien le temps d'asseoir l'ambiance. SEPULTURA joue de la musique lourde, oui, mais il le fait aussi autour du feu, le calumet de la paix dans une main et la hache de guerre dans l'autre. Des opposées qui rendent cet album inoubliable.