Voici des années que j'entends parler du groupe ROTTING CHRIST, sans pour autant me soucier de leur musique. Un nom aux teintes peu catholiques, reflet d'une certaine façon d'envisager le metal extrême.

Voici déjà 17 ans que le groupe grec existe et fait figure de groupe mythique dans le pays, à l'instar de SEPTIC FLESH. Et il s'en est passé des choses pendant cette période : tournées dans le monde entier (Amérique du Sud, Turquie ...), premières parties de grands groupes d'obédiences diverses comme IMMORTAL, SAMAEL, MOONSPELL, DEICIDE, THEATRE OF TRAGEDY, CRADLE OF FILTH ou TIAMAT.

Car partant de ses origines Black Metal (qui sont encore bien présentes dans leur musique), ROTTING CHRIST a intégré des éléments Thrash, Gothiques, Électro et Atmosphériques, teintes qui sont plus ou moins appuyées suivant les morceaux.

C'est ce qui fait la richesse de ce "Sanctus Diavolos" particulièrement réussi et... envoûtant. C'est le terme que je retiendrais de ces écoutes. Chaque morceau est empreint d'une atmosphère, voire d'une plénitude religieuse : "Sanctimonius", sans doute le morceau le plus ambient en est le plus bel exemple. On nage ici dans un autre monde.

Effectivement, des synthétiseurs systématiquement en fond sous-tendent le côté atmosphérique, même quand la musique se fait violente et que le Black Metal revient à la charge ("Visions Of A Blind Order" ouvre l'album dans cette veine). Le climat est presque toujours oppressant, avec souvent des tempi de moyens à rapides.

Le registre vocal de Sakis va d'incantatoire aux teintes aiguës du Black Metal, un peu à la manière de Dani (CRADLE OF FILTH). Mais la voix n'est pas forcément mise en avant, se fondant dans le maelström général. Les chœurs monastiques (on se croirait dans l'atmosphère du Nom de la Rose) ou typés "Carmina Burana" sont géniaux. La musique est donc souvent Black, parfois des riffs Thrash surviennent ("Serve In Heaven") quand elle ne se fend pas d'une coloration plus mécanique voire électronique parfois proche de SAMAEL.

Un morceau comme "Thy Wings Thy Horns Thy Sin" se permet même d'alterner les genres. Les solos de guitares, même s'ils se font plus rares que la moyenne, sont intenses et de toute beauté ("Sanctimonius", "Sanctus Diavolos"). A noter justement que sur "Thy Wings Thy Horns Thy Sin", leur compatriote le guitariste Gus G. (NIGHTRAGE, DREAM EVIL, FIREWIND, MYSTIC PROPHECY) est venu leur donner un coup de main en tant que guest (pourtant, le Gus ne joue pas habituellement dans les groupes extrêmes, témoignage de l'éclectisme musical du monsieur).

ROTTING CHRIST démontre ici qu'il est le chantre d'une musique très personnelle, d'un alliage violence-douceur pas forcément évident à gérer mais qui, s'il est réussi, emmène l'auditeur vers des rivages insoupçonnés. Ceci est renforcé par la production de Fredrik Nordström (les célèbres studios Fredman en Suède). D'ailleurs, dès la fin du disque, mes doigts se dirigent pour reconduire le tout sur la plage 1. Si ce n'est pas un signe... Sombre, violent, mystique, ce disque tombe à point nommé pour la grande rentrée des messes noires.