Fer de lance du Black Metal grec depuis ses débuts, ROTTING CHRIST enchaîne les perles noires sans sourciller. Souvenez-vous du cruel "Thy Migthy Contract", une collection satanique de haute volée dont les radiations cyclopéennes provoquent encore aujourd’hui des meurtrissures chez les amateurs du style. Le missile "Non Serviam" grâce à sa qualité avait ensuite poursuivit le massacre des innocents en convertissant de nouveaux adeptes encapuchonnés. Avec "Triarchy Of The Lost Lovers" nos guerriers lucifériens réussissent le tour de force de rendre leur musique plus accessible tout en conservant leur aura illuminée. Pour cela, ils peaufinent leurs riffs et leurs mélodies pour un rendu peut-être moins sombre, mais plus fluide et mélancolique que jamais auparavant. Les guitares sont tranchantes comme des lames de rasoirs et notre compositeur Sakis aligne des thèmes souvent marquants, lesquels hypnotisent la plupart du temps les auditeurs. Son chant éructé est toujours aussi charismatique et abrasif, alors que les ambiances sont encore soulignées par de discrets claviers.

Malgré ses prouesses hors-norme et son pouvoir de persuasion, cet album ne se hisse pourtant pas au-dessus de ses prédécesseurs. Des couleurs plus chatoyantes et des mélodies plus évidentes ne suffiront pas à effacer le souffre et la douleur, autant que les tempêtes de riffs méphistophéliques qui nous étaient infligés jadis. Cependant, la pertinence de la démarche du groupe, doublée d’une inspiration aussi vive que déterminée, saura convaincre les fanatiques des premières œuvres plus ténébreuses. Plus de clarté ici ne nuit pas à l’avancée de son géniteur et à son implacable maîtrise des atmosphères mystiques.

Les majestueux morceaux d’ouverture, "King Of A Stellar War" et "A Dynasty From The Ice" sont simplement des chefs d’œuvres du genre, parmi les meilleures créations mid-tempo que les musiciens nous aient offert. Cette alliance étincelante de mélodies percutantes avec cette science du riff assassin se révèle incontournable. Ces déflagrations deviennent de ce fait un plaisir de tous les instants, au point que la suite de l’opus paraît inférieure, mesurée à l’aune de ces pépites. En vérité, les autres pistes restent d’un niveau tout à fait satisfaisant et bien plus, notamment le véloce "Archon" dont les enchaînements efficaces ne laisseront pas indifférent. Citons également le miraculeux "The Opposite Bank", qui alterne des couplets aériens précieux avec un refrain vif comme un coup de serpette, lequel est surplombé de riffs jouissifs, une véritable bombe. Notons de surcroît les ciselés "Shadows Follow" et "The First Field Of The Battle", gorgés de guitares remarquables ou encore l’ouvragé "One With The Forest" et ses consonances Heavy Metal 70 ‘s assez étonnantes.

ROTTING CHRIST le PHIDIAS du Black Metal, sculpte quelques salves phénoménales dans ce recueil qui demeure un indispensable du panthéon hellène. Une œuvre savoureuse et raffinée de la part de nos athéniens, à posséder et à réviser autant que faire se peut.