On a longtemps pensé que FEAR FACTORY avait trouvé "The next big thing", la nouvelle révolution musicale, l'absolu en termes d'efficacité. Peu de temps après la géniale invention du rap metal, un genre que pas grand monde n'a vu débarqué malgré de très longues années de gestation (qui se souvient encore du "Walk This Way" co-performé par AEROSMITH et RUN D.M.C ?), la planète a découvert la fusion ultime, celle qui réconciliera les tatoués et les piercés, les cheveux longs et les orange. Une découverte officialisée par une compilation nulle, bande originale d'un des nombreux films catastrophe de super-héros, "Spawn". METALLICA s'y acoquinait avec le sublime ORBITAL, KORN faisait l'amour aux DUST BROTHERS, Henry Rollins entamait une cure de jouvence grâce à GOLDIE, RAGE AGAINST THE MACHINE se frottait au géant du moment PRODIGY.

Deux mois avant cet album, FEAR FACTORY s'asseyait sur le trône de ce nouveau sous-genre prêt à faire exploser la société toute entière. Deuxième essai du genre après le plus confidentiel "Fear Is The Mindkiller", remix bip bip de "Soul Of A New Machine", "Remanufacture" ("Remanufacture – Cloning Technology" dans son patronyme intégral) prenait dès sa sortie dans les bacs allure de test. Tout l'univers des médias s'était accordé pour adouber "Demanufacture" œuvre d'exception, sa version électronifiée allait-elle provoquer le cataclysme attendu ? Rhys Fulber, ancien membre de FRONT LINE ASSEMBLY et déjà responsable d'une partie du lifting techno de "Soul Of A New Machine" et Junkie XL, deux pointures du monde de l'électronique devaient aider le groupe de Los Angeles à devenir leader de cette nouvelle scène à peine éclose.

Si, à l'époque, le disque avait agréablement surpris, l'objet a aujourd'hui pris des rides qui auraient pu lui forger le caractère, qui lui ont tout simplement donné un coup de vieux. Sans même évoquer le manque de cohésion d'une galette malaxée par plusieurs personnes sous des auspices variés, on peut dire que cette compilation a failli. La tâche était immense et on s'aperçoit dix ans après que la sauce n'a pas pris et que le techno metal ne deviendra jamais ce qu'il aurait pu être. La faute à "Remanufacture" ? Plus généralement la faute à dame Nature. Certains mélanges prennent à merveille, d'autres moins. Ne voyons pas tout en noir, l'ensemble est plus cahoteux que raté. Tantôt pas mal du tout, tantôt furieusement casse-couilles.

Revue d'effectif non exhaustive avant d'en finir :
"Remanufacture" sautille avec allégresse, simple surlignage électronique d'un morceau déjà garanti d'exception. Le passage strictement techno s'en tire avec les plus belles honneurs.
"National Panel Beating", reprise de "Body Hammer", pâtit d'une nouvelle direction trop sombre et d'un climat G-Funk bien déplacé.
L'énorme "Replica" se voit bidouillé sans qu'on saisisse totalement l'intérêt de la chose. Le morceau devient trop touffu, indigeste malgré une courte séquence aux accents très hip-hop préhistorique.
A moins d'aimer le hardcore destructeur de MIKROPOINT, "T-1000" risque de faire beaucoup de victimes qui comprendront enfin que l'extrême musical n'est pas forcément celui que l'on croit.
"A Therapy For Pain", rebaptisé "Bound For Forgiveness" procurera un intense bâillement prélude à un somme futuriste.

C'est vrai, "Remanufacture" a vieilli en perdant toute sa superbe, il constitue cependant une tentative ambitieuse. Plus ambitieuse encore quand on sait qu'il propose à ses auditeurs une courte exploration de nombreux genres, trance, ambient, hardcore hollandais, breakbeat. Et si j'avais dit que je ne tiendrais pas compte de l'hétérogénéité de la chose, difficile maintenant de trop charcuter l'objet dans la notation.