Dans le monde de la mauvaise critique musicale, de la chronique paresseuse et du pissage de copie, il est commun de qualifier le troisième longue-durée d'un artiste d'"album de la maturité". Une expression rance comme l'haleine d'un zombie croqué par Vince Locke et qui, pourtant, s'accommode parfaitement de ce qu'est "Tomb Of The Mutilated" dans la discographie de CANNIBAL CORPSE. Nombreux sont ceux qui, bientôt, déploreront que le quintette soit en roue libre, côté composition, mais en 1992, au contraire, il achève d'asseoir son style inimitable (enfin, si : imitable mais en moins efficace). Et "La Tombe des mutilés" tient toutes les promesses que "Butchered At Birth" laissait entrevoir, la crasse en moins. Car la production y est plus claire et équilibrée, ce que d'aucuns regrettent encore mais qui, pour le salut des riffs de guitare et de la basse d'Alex Webster, est plus que bénéfique.

Donc "Tomb Of The Mutilated" établit définitivement CANNIBAL CORPSE comme le maître du Death Metal gore et vil. Avec une pochette plus suave et raffinée que les deux précédentes mais tout de même très vicieuse. Et des titres (et paroles) qui font encore aujourd'hui la légende des néo-Floridiens. "I Cum Blood" ("Je jouis du sang"), "Addicted To Vaginal Skin" ("Accro à la peau vaginale"), "Necropedophile" (qui se passe de traduction), "Entrails Ripped From A Virgin's Cunt" ("Entrailles arrachées de la chatte d'une vierge"), "Post Mortal Ejaculation" ("Éjaculation post-mortem")... Jamais plus le combo ne sera aussi frontal dans son goût du sexe violent et d'une misogynie brutale (heureusement de façade). Mais la musique, elle aussi, atteint des niveaux de qualité supérieurs et les "tubes" mémorables du groupe sont ici nombreux.

Du mythique "Hammer Smashed Face", encore mâtiné d'un Thrash Metal in your face sachant équilibrer assauts rapides et passages plus lents et """mélodiques""" (haha…) à "Necropedophile", c'est un quasi sans faute, à peine amoindri par un "Split Wide Open" légèrement en retrait. Il faut dire que "I Cum Blood" envoie la purée (re-haha…) avec son riff addictif et ses fréquentes parties mid tempo bien groovy. Que "Addicted To Vaginal Skin" tient lui aussi un riff prenant qu'Owen et Rusay accélèrent subitement sur un final fatal. Et que le plus syncopé "Necropedophile" implante insidieusement ses parties de gratte dans le… cerveau, bien sûr. Ensuite, 'CANNIBOULE' est plus irrégulier – le très POSSESSEDien "The Cryptic Stench" en témoigne – mais reste percutant grâce au très solide "Entrails…" et à la vélocité d'un "Post Mortal Ejaculation" qui s'égare toutefois sur sa fin. Rien, toutefois, qui ne compromette le bond en avant réalisé par le groupe.