Dire de la discographie de MEKONG DELTA qu’elle est irrégulière serait un euphémisme. Moi je parlerais plutôt de « montagnes russes » artistiques et je serais sans doute encore assez loin du compte.

Si on fait un petit récap’ pour ceux qui dorment au fond de la classe :


Année Album Appréciation Valeur

1987 Mekong Delta Déroutant et perfectible -
1988 The Music of Eric ZANN Encourageant +
1989 the Principle of Doubt Raté - -
1990 Dances of Death Grandiose + +
1992 Kaleidoscope Spécial, revirement Prog ?
1994 Visions Fugitives Lisez la kro bande de malappris - -

(Je reviendrai prochainement sur l’album "Kaleidoscope")

Heureusement que je suis là pour vous aider à distinguer le vrai du faux… Non, ne me remerciez pas.

Le ratage de "Visions Fugitives" était logiquement et mathématiquement prévisible, vu l’historique du groupe. Et je vous le confirme, cet album est assez médiocre. Si j’étais grossier, je parlerais d’anus dilaté, d’album de merde et de sodo-graviers mais je vais revenir au sujet principal.

Après un "Dances Of Death" terrifiant de richesse incroyable, MEKONG DELTA semble revenir à la case départ façon régression « néanderthalienne ». Les pires défauts du groupe réapparaissent en bloc : riffs improbables, morceaux décousus, volonté anti-mélodique, résultat chiantissime et production merdique. En un mot comme en cent : le désastre.

À cette nullité musicale affichée, MEKONG DELTA se complaît à brouiller les pistes. Les morceaux les plus incroyables (dans le mauvais sens du terme) s’enchaînent les uns sur les autres, pendant que le pékin lambda se fait grave chier. Puis, boom, comme par magie, surgit l’adaptation néo-classique en plein milieu de l’album (track 3 à 8). C’est encore ce bon vieux Sergueï qui morfle. Passé à la moulinette par nos Techno-Thrasheurs allemands, la victime n’est autre que la pièce pour piano de PROKOFIEV "Visions Fugitives" (1) (d’où le titre) (tout s’éclaire) (je vois votre sourire béat de compréhension) (fin des parenthèses) (là).

Que dire concernant cette nouvelle adaptation Thrashistico-Classique (à tendance « Progueuse ») ? Elle est révélatrice de l’irrégularité du groupe. On alterne le magnifique avec l’acoustique un rien hispanisante (Suite) pour se prendre dans la foulée une horrible instru mixant en avant synthé et batterie ("Preludium"). Cette grande disparité est souvent horripilante (Fugue), souvent intrigante (Dance). MEKONG DELTA mélange tout avec un zèle brutal et ne laisse pas d’alternative. Les musiciens sont dans un « trip » et ils foncent tête bêche. À vous de décider de les suivre ou non. Sur ce coup-là, ce sera sans moi, même si j’admets que l’étrangeté de l’œuvre force globalement le respect. L’avis mitigé est de rigueur.


Quoiqu'il en soit, le fait de placer l’adaptation « Prokofienne » en plein cœur de l’album fout un sacré coup à l’album en terme de cohésion. En entourant son album des titres les plus mauvais (intro/outro), MEKONG DELTA semble avoir voulu cacher l’intérêt de son album en mettant du caca partout autour. Reste que si la démonstration centrale par de fugaces instants est énorme, bah globalement ça pue quand même.


Note : 2/5.


Morceau préféré du Canard : "Suite For Group & Orchestra"


(1) : PROKOFIEV : "Visions Fugitives" (20 pièces pour piano) (1915-1917)