Que le temps passe vite. Il n’y a pas encore si longtemps, je lisais ma première interview de DARKTHRONE dans Metal Hammer dans laquelle le groupe disait refuser la distribution trop vaste de ces albums afin de rester dans un underground qui leur convenait à merveille. Onze ans ont passé et Fenriz et Nocturno Culto proposent aujourd’hui Hate Them, dixième album d’un duo particulièrement prolifique. Ces onze années ont connu leur métamorphose du stade d’obscure formation norvégienne aux propos outranciers à celui de demi-dieu adoré par toute une frange de l’auditoire Black Metal. Qu’attendre de la cuvée 2003 de ce groupe réputé pour son orthodoxie?

Au rayon des nouveautés inutiles, DARKTHRONE clame haut et fort que Hate Them a été enregistré et mixé en vingt-six heures. A moins de vouloir se voir consacrer une page du Livre Guinness Des Records, cette creuse information montre à quel point son attachement à une certaine esthétique et à une ligne de conduite parfois artificielle est toujours d’actualité. Notons quand même que le travail de production a été parfaitement réalisé au regard des critères du genre, le rapport temps passé/efficacité étant simplement prodigieux. Les plus attentifs noteront également les références au Black Metal dans les textes comme ce «black metal is the devil’s fuel» dont les esprits pointilleux noteront le caractère boiteux.

Sur le plan strictement musical, ce nouvel opus bien que porteur de peu de nouveauté est très satisfaisant. Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et l’odeur de soufre qui imprégnait les premiers disques s’est finalement volatilisée. L’atmosphère qui se dégageait d’A Blaze In The Northern Sky et de Transilvanian Hunger, à juste titre considérés comme les deux chefs d’œuvre du groupe, autant due à la musique qu’aux circonstances sur lesquelles je ne reviendrai pas, n’est plus qu’un ténébreux souvenir. Certaines comparaisons s’avèrent impossibles.
Plus juste serait de confronter Hate Them avec ses coreligionnaires actuels. DARKTHRONE peut dresser fièrement la tête car il démontre à tous ses détracteurs que ses funérailles devront attendre. Contrairement à d’autres combos incapables de développer une quelconque noirceur, Fenriz et Nocturno Culto ont conservé leur caractère sombre et menaçant et savent encore le faire transparaître dans leur musique. De plus, quelques plans rafraîchissants ressortent encore derrière un voile pourtant vieillissant, comme ce groove infernal sur striving for a piece of lucifer.

Hate Them est peut-être le meilleur album de DARKTHRONE depuis sa signature chez Moonfog. Certes, le duo norvégien est extrêmement fécond (le successeur de l’opus ici chroniqué intitulé Sardonic Wrath, est déjà annoncé pour le début de l’année prochaine) mais cette fertilité souvent décriée car celle-ci s’associe chez tant d’autres avec le terme dilution, ne nuit ici pas à la qualité. Hate Them est solide, rassurant et rassérènera tous ceux qui ont constaté de sérieux signes d’essoufflement créatif à l’écoute de Plaguewielder.