Une compilation, c’est toujours difficile à aborder. Soit nous nous échinons à la juger en fonction des morceaux qui la parsèment et dans ce cas, on la prend pour ce qu’elle est sans se poser plus de questions que cela. Soit nous la décortiquons pour son intérêt et là, elle peut être bourrée jusqu’à la gueule de classique, si elle n’apporte rien, elle ne sert pas à grand-chose. "Made In Germany" peut se placer dans chacun de ces deux cas. Elle est blindée de morceaux destinés à piétiner l’auditeur sans relâche, mais elle est également d’une vacuité assez sidérante.

Les fans de la première heure en seront pour leurs frais. Les trois morceaux qui datent de l’avant-"Mutter" font véritablement figure de rescapés d’une ère qui semble aujourd’hui si lointaine. C’était comme si la carrière du groupe avait débuté avec cette machine à tubes qu’est "Mutter". Mais en grattant un petit peu, nous comprenons rapidement que ce n’est pas qu’une compilation, c’est un Greatest Hits, soit les singles qui ont le mieux fonctionné. Aussi, les premières années n’ont pas été très prolixes en la matière et forcément, elles seront moins représentées.

En revanche, ceux qui ont adhéré au discours de "Mutter" où qui sont arrivés à RAMMSTEIN avec "Reise Reise" seront en terrain connu, pour ne pas dire conquis. Il ne faut pas croire cependant que nous tenons là la facette la plus mainstream de RAMMSTEIN, les Allemands ayant toujours proposé quelques tueries en single, à l’image de "Keine Lust" ou encore "Mein Teil". Bref, à l’exception de quelques ballades ("Ohne Dich", incontournable), il n’y a que du costaud, aussi bien dans les hymnes féroces que dans les marches martiales dont ils ont le secret.

Bref, la personne qui ne connaît pas le groupe (et déjà en 2011, il fallait avoir passé une quinzaine d’années en ermite vu qu’il était impossible de passer à côté de ce phénomène, que l’on retrouvait aussi bien dans des BO de films ou sur n’importe quelle chaîne de grande écoute) va en prendre pour son grade ; une véritable leçon de Metal Industriel à l’allemande. Est-ce que toute la gloire du mouvement Neue Deutsche Härte figurerait dans ce disque ? N’exagérons rien. Mais ce best of offre un plutôt bon panorama de ce qu’est RAMMSTEIN à son meilleur niveau depuis les années 2000.

En revanche, le fan qui a déjà tous les albums ? Lui, il devra se contenter de "Mein Land", un titre qui ne se prend absolument pas au sérieux comme en témoigne son clip. Le morceau explose surtout sur sa fin, où l’on retrouve des sonorités Indus proches des premiers méfaits de nos Teutons bodybuildés. Et à part ça, il connaît déjà tout. Sur le bout des doigts. Oh, ça ne va pas l’empêcher de prendre son pied, bien sûr. Après tout, qui n’a jamais chanté en chœur "Du Hast" ou "Amerika" ? Difficile de faire plus fédérateur après tout, peu importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse.

Mais cette volonté de mettre une multitude de titres connus a quelque chose d’un peu gênant. En tant que fan, qu’est-ce que moi j’attends d’une compilation d’un groupe dont je possède déjà toute la discographie ? De l’inédit ? Des versions alternatives ? Du live de morceaux plus rares (c’est-à-dire qui ne figurent pas sur "Live Aus Berlin", "Volkerball" ou n’importe quel autre DVD du groupe) ? Ces titres sortis en single uniquement et qu’il est possible d’avoir raté, à l’image de "Das Modell" ? Quelques reprises façon "Stripped" ? Bref, des choses qui complètent ce qui est déjà disponible sur les opus studio.

"Made In Germany" s’écoute un peu comme un plaisir coupable. Parce que ça n’apporte strictement rien si l’on connaît déjà RAMMSTEIN, sinon "Mein Land", qui s’écoute sans déplaisir mais qui n’apporte pas grand-chose à l’équation. Aussi, il convient de laisser ce produit aux néophytes pour s’intéresser à un autre versant de cette compilation : sa version DVD qui reprend les mêmes titres plus quelques autres, mais en présentant leurs clips ainsi que des making of qui en disent bien plus sur les chansons qu’on ne le croit. La version CD ne sert quand même pas à grand-chose.