On creuse, on creuse la discographie du nouveau leader de la scène païenne et on se retrouve aujourd'hui en 1995 aux prises avec un disque qui dessine les moments les plus sombres de l'artiste. En cet exact milieu des années 90, les sous-machin, les sous-bidule et les sous-truc poussaient comme des champignons sur la terre fangeuse de l'underground. Tout le monde était pressé, les labels sentaient l'intérêt des foules pour le son norvégien et se devaient de proposer des produits qui en possèderaient au moins certaines caractéristiques, les apprentis musiciens, tantôt malins tantôt simplement fascinés par les débuts géniaux des dieux de la scène scandinave voulaient naturellement émuler les stars de l'instant. Résultat naturel de cet empressement, un flot de productions bas de gamme ont commencé à envahir les étals de disquaires ravis d'écouler tout et souvent n'importe quoi, avec pour unique contrainte marketing, la nécessité d'une étiquette. Cette étiquette pend au cou de PRIMORDIAL alors méfiance.

Mais en 2008…
PRIMORDIAL est unique, il est parvenu à développer une esthétique qui le distingue intelligemment de ses collègues. PRIMORDIAL est constant, chacune de ses livraisons récentes, pourtant bien différentes, atteste d'une qualité jamais démentie. PRIMORDIAL est sérieux, son sens du détail, sa volonté sonore le qualifient de professionnel, qualité pas toujours évidente à déceler chez nombre de musiciens signés avant leur mise au point.

Treize ans plus tôt, posons-nous la question du caractère d'un quatuor qui lève haut le drapeau gaélique. Et la réponse ne se fait pas attendre.

Quelques secondes d'écoute, une guitare acoustique qui porte déjà l'accent sur ce qui fera l'essentiel du caractère du combo irlandais, le folk. Accent doublé de paroles en gaélique qui permettent en cinq petites minutes de marquer PRIMORDIAL du saut de l'originalité. Pourtant oui, "Imrama" constitue le seul véritable opus black de son créateur. Mais un black déjà serti d'épique et d'atmosphères. Mais on dirait du sous-ULVER, non ? Chut, tout allait si bien.

Si bien jusqu'à "The Darkest Flame", une chanson heavy metal et d'amour affublée d'une voix aux instincts mystiques et déclamatoires qui achève son office sur des vers de Baudelaire. Un titre aux qualités intrinsèques réelles mais qui peine à trouver sa place au sein d'une communauté feu, flammes et grandes étendues.

C'est alors qu'on réfléchit en continuant notre route sur le disque, en suivant les cavalcades qui reviennent, en trempant dans la celtitude de "Beneath A Bronze Sky", en entendant MAIDEN sur "The Calling". Et l'évidence nous tombe dessus, PRIMORDIAL est jeune, très jeune. Jeune dans ses tentatives au liant pas toujours convaincant, jeune dans l'organe vocal d'un chanteur qui aura beaucoup progressé avec les années, tant dans un registre black pour l'heure très conventionnel que dans un registre clair qui débute sur de l'extrêmement médiocre. Cet organe constitue même le point le plus noir d'un disque sympathique aux bons moments parfois mal agencés, simple prélude à de grands, à de très grands moments mieux agencés.