PRIMORDIAL a bien reçu l'étiquette "black metal" à sa naissance. Internet nous permet d'ailleurs de constater que certains y croient encore. Cela fait pourtant déjà longtemps que le combo irlandais a jeté aux orties ses dernières accointances avec le genre le plus noir du rock. Internet nous permet également de jauger la popularité d'un groupe capable de rassembler autour de ses compositions impeccablement travaillées les amateurs de sons les plus divers. Oui, PRIMORDIAL ratisse large. Très large. Et le précédent album, The Gathering Wilderness, a recueilli moult suffrages au sein de la plus étendue des communautés metal. Du metal épique, abrasif juste assez pour qu'on s'y croie, tendance viking (celtique) atmosphérique avec production intelligemment chromée.

Une pochette intéressante, qui mêle force, élégance et tragédie. Assurément, rien de bien acide. Ne cherchons pas de véritables aspérités (celles qui dépassent la vague surcouche abrasive dont je viens de parler) chez PRIMORDIAL, elles n'existent pas. Plus exactement, elles n'existent plus. Et To The Nameless Dead surclasse encore son prédécesseur en facilité d'écoute. Une production chaude, over the top, qui ne fera peur à personne, un véritable esprit de conquête du tout-venant. Avec ce nouvel album insulaire, on connaît déjà la fin de l'histoire après quelques courtes notes de musique. To The Nameless Dead va tout rafler. Et c'est bien là son point faible. Car les étiquettes collent à la peau et il semble bien difficile de se départir de l'envie de penser à PRIMORDIAL comme un groupe de black metal. Un truc un peu underground quand même. Alors que l'artiste surfe à plein sur la vague du mainstream. Plus mainstream encore qu'un prédécesseur qui jouait beaucoup sur les ambiances. Tout est ici plus direct, plus simple, trop simple. Pas assez simple pourtant pour crier au scandale. Car je développe là le seul argument en défaveur d'une galette qu'il est impossible de ne pas aimer. Pardon, une galette dont on ne saurait apprécier l'ensemble des qualités. Des qualités immenses toute faites pour séduire le plus grand auditoire.

To The Nameless Dead, c'est un son énorme. Un son porteur d'une puissance prompte à faire bander le muscle, prompte à rendre plus fort.
To The Nameless Dead", c'est un talent d'écriture qui nous saute à la gueule dès "Empire Falls", titre à la percussion totale. Un talent d'écriture qui joue autant la carte de l'addiction immédiate que celle de la progression savoureuse. Afin que nul ne se plaigne d'un trop-plein de simplicité (je l'ai dit plus haut).
To The Nameless Dead, c'est une esthétique miroir de ce savoir composer. Un drapeau guerrier mais en berne, les guerriers laissent parler leur affect.
To The Nameless Dead, c'est un équilibre parfaitement trouvé entre punch et épique. BATHORY (et tant d'autres) nous avait habitué à faire traîner ses envies grandioses, PRIMORDIAL sait se mesurer et rester dans les clous du raisonnable.

Je me vois obligé de m'incliner. Cet album est bon, très bon, excellent. A condition de ne pas essayer d'y voir la moindre tentation black, à condition de penser PRIMORDIAL comme faisant partie du mainstream metal, à condition de ne pas rechercher le soufre. Dans le cas contraire, PRIMORDIAL sera trop bon. En deviendra donc douteux.