3 ans se sont écoulés depuis le remarquable Contre-Courant. Entre-temps, le live Ennemis en Public tombait à point nommé comme un excellent best-of pour nous remémorer les plus belles batailles du groupe basque, l'énergie live en plus.
Contre-courant avait marqué les esprits par un style plus brut et de nombreuses chansons d'excellente qualité, il fallait dès lors lui donner un petit frère.

Fort Intérieur continue dans cette veine empreinte de combats, de sincérité ... et de bon gros metal bien entendu. Une des caractéristiques principales de ce disque est sa longueur. Pas moins de 16 titres figurent ici. Avec une durée moyenne de 4 minutes, la bête dépasse les 70 minutes, témoignage de l'activité prolifique de ses concepteurs.
Par contre, une telle longueur est à mon sens une arme à double tranchant. Le bon point, c'est que celà procure une bonne illustration de la richesse du groupe, aussi bien au niveau des textes et des thèmes abordés par Bruno qu'au niveau variété musicale. L'envers du décor, c'est qu'il faut faire tourner l'album un certain temps justement pour s'imprégner de tous les climats et de cette richesse précisément. Des morceaux marqueront néanmoins les esprits assez rapidement.
Le rapide "Paranoia" au riff énergique qui peut évoquer MOTÖRHEAD évoque d'emblée l'état d'esprit d'une époque où la peur de l'avenir et de l'engagement plâne sur la race humaine, telle une épée de Damoclès. Le saccadé "Sûrs de rien" (et son joli break) entretien cette pression. "Allez vous faire ..." laisse deviner ce que pense le combo et décris le mépris (réciproque) que l'on peut vouer à une classe dirigeante qui ne pense qu'à ses propres ambitions. Autre sujet de choix, la religion et ses dérives fanatiques avec "Les fous de Dieu", thème malheureusement toujours d'actualité.
La mixture "pouvoir, répression et complaisance médiatique", encore un sujet très vivace et dépeint dans "Royaume du silence". On ne va pas tout détailler, mais voici quelques exemples qui nous interpellent dans notre vie de tous les jours. Et c'est en celà surtout que KILLERS est un groupe attachant, c'est qu'il reste ancré dans des problématiques que nos compatriotes retrouvent dans leur quotidien, ce qui n'empêche pas parfois d'enrober le tout dans une bonne dose d'humour et de dérision finement calculée ("Mode d'emploi").

Niveau musique, ça va du bien speed qui défonce tout avec par exemple "Plus fort que la colère" ou le décapant "Victime", hargne renforcée par la voix de Bruno. "Sauve qui veut" est remarquable par l'enchainement des tempos. Le festif "Arrantzale" chantée en basque est un classique du groupe ; l'exercice sera réitéré plus tard sur Mauvaises Graines et Habemus Metal. Chanson attachante traitant du thème de l'absence et de la mort, "Pour Toujours" est réellement magnifique et prend aux tripes.

Fort Intérieur est un bon album mais plus difficile à appréhender car moins immédiat que son prédécesseur. Il marque la fin d'une époque pour KILLERS. Le guitariste Ronan ainsi que les compagnons de route Alain et Patrick quittent l'aventure. C'est sans compter sans la détermination de Bruno, qui en profitera pour rebondir très vite avec de nouveaux jeunes musiciens, injectant ainsi une dose de sang neuf dans les rouages de la machine. La suite avec ... ben l'album 109 justement ;).