Les montagnes. En anglais : aux montagnes. C'est ainsi que se traduit le titre du premier album de VINTERSORG, "Till Fjälls", un classique méconnu qui sera ici réhabilité à sa juste valeur.

Pour bien comprendre la qualité de ce disque de Viking/Pagan à la facture simpliste, mais de haute qualité, on doit se remettre dans le contexte et voir contre qui se battait Andreas Hedlund, le formidable créateur derrière ce projet extraordinaire. BATHORY poussait ses derniers soupirs, BORKNAGAR commençait sur les chapeaux de roue (Andreas, alias Vintersorg, joindra d'ailleurs ses rangs en 2001 sur "Empiricism" grâce à sa voix unique et magique), ENSLAVED s'apprêtait à passer du côté psychédélique de la Force après avoir sorti "Blodhemn", alors que des groupes comme EINHERJER, FALKENBACH et THYRFING lançaient aussi leurs lignes à l'eau en espérant passionner l'auditoire avec leurs fables homériques.

Pour lancer sa carrière comme une fusée, Andreas s'est entouré de quelques guests, dont la chanteuse à la voix angélique Cia Hedmark et deux claviéristes, Vargher et Nisse Johansson. Ces deux pianistes suivront le maître de piste sur quelques albums par la suite, avant qu'il ne s'acquitte seul de cette tâche très importante chez VINTERSORG. Pour ceux que ça intéresse, le guitariste et compère d'Andreas, Mattias Marklund, est apparu pour la première fois sur "Cosmic Genesis", deux ans après ce premier album. Mais pour la majorité des idées absolument grandioses qui marqueront VINTERSORG, on doit d'agenouiller devant Hedlund.

Alors, pourquoi cet album est-il si mythique ? Il traduit en quarante minutes pourquoi le Viking Metal est si fascinant chez la frange de fans d'extrême s'y intéressant. D'accord, c'est facile en 2017 d'écrire cela, mais si je devais poster cette chronique de manière intemporelle, je dirais que "Till Fjälls" est le versant romantique de l'existence brutale, festive et spirituelle des Vikings. La diversité des plages, tantôt offensives mais toujours accessibles grâce à leur imagerie clairvoyante ("För Kung Och Fosterland", "Urberget, Äldst Av Troner", "Jökeln"), lourdes mais Folk dans l'âme ("Vildmarkens Förtrollande Stämmor", "Isjungfrun"), fédératrices ("Till Fjälls" et son synthé et refrain inoubliables, "Asatider", Fångad "Utav Nordens Själ"), est le principal atout de ce skeud pérenne.

Au-delà de tous les petits artifices lancés dans les cieux déifiés par VINTERSORG, le chant fabuleux d'Andreas, qui s'éclaircira par la suite, est un des plus grands legs de ce tremplin. Même si la production n'est pas au poil, pour ce style en 1998, "Till Fjälls" dévoile au monde entier un des meilleurs potentiels de la planète Métal épique : un vocaliste capable de maîtriser les chants clair et brut, tout en injectant une lourde dose d'émotions dans le lot. Les disques suivants consolideront l'indéniable talent d'Hedlund, qui semble avoir été touché par la grâce des dieux.

Qui aurait cru que 20 ans après la parution de ce "Till Fjälls", porte d'entrée du Suédois, dont je compare aisément le génie créatif à celui d'IHSAHN ou à celui d'Ivar Bjørnson, tête pensante d'ENSLAVED, en frais de Metal scandinave, serait lancé un second volet tout aussi jouissif ? Comme quoi Hedlund a toujours gardé son esprit près des montagnes…

Gageons aussi que cette expérience stimulante est toujours demeurée ancrée dans l'esprit d'Andreas…

Un superbe premier album, qui, sans être parfait, harponne l'amateur de Metal épique sans trop d'effort. Un must have.

Podium : (or) "Till Fjälls", (argent) "För Kung Och Fosterland", (bronze) "Isjungfrun".

Indice de violence : 2/5.