Shamaatae est sur une lancée. "Antikosmos" sorti en 2008, le bien nommé "ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ" en 2009 et ce "Sviga Læ", un an plus tard. Il complètera le quatuor en 2011, poussant sa créativité probablement au maximum, surtout sa capacité à créer des riffs sanglants dans un Black bien violent, pas trop compliqué, mais au potentiel de revenez-y assez impressionnant. Comme quoi ce ne sont parfois pas toujours les disques les mieux réussis qui nous accrochent le plus, qui nous donnent envie d'écouter en boucle en quêtant presque pour réentendre ce trémolo nerveux ou cette mélodie meurtrière sous couvert de chant banal, mais syndicalement acceptable.

"ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ" m'avait séduit par sa fougue de bête des profondeurs, un Black forestier bien velu aux moments marquants. Un album crado, mais pas trop, bien produit pour le style, créant une dépendance assez rapidement. Je m'attendais donc à un truc de ce genre sur "Sviga Læ" à la pochette affreuse. Force est de constater que Shamaatae a baissé légèrement le ton, en coupant dans la prise de risques et en engraissant ses cordes.

Le résultat, s'il est évident que nous nageons toujours en eaux Black, lorgne davantage vers le Death/Black que son prédécesseur. Le sieur nous offre six plages potables et deux ennuyantes au possible en "Andskoti Ferr Austan" et "Røk", lentes et atmosphériques, sans substance véritable. Le reste balance entre le Black pur jus et le Black/Death bien lourd, où la basse prend une place prépondérante.

Prenez par exemple "Lae Elr", "Gramr Girnisk" et "Múspellzheimr Kemr". Cela ne vous fait pas penser à du Death ? Surtout les deux derniers… J'ai songé instinctivement au groove de groupes comme BOLT THROWER ! Shamaatae serait-il en perte d'inspiration pour pomper ainsi des morceaux pachydermiques au Death bourrin ? Bah… Sans crier au scandale, disons que "Sviga Læ" risque de plaire à plus de fans de Metal Extrême grâce à ça ; je leur conseille d'ailleurs plus que "ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ", qui ne bottera que les mordus de Black. Oui, je vous le dis, ces plages 5 et 7 arrachent tout de leurs riffs rondelets et font headbanger sauvagement… même s'ils font clairement partie d'une autre écurie que le Black basique pour moi.

Causant de Black, la morsure ARCKANUM se fait ressentir sur "Gylðir Algørir" ou "Goðin Eru Blekkt", deux bons titres sans grande prise de tête, à l'image de "ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ", mais avec cette basse bien roucoulante. Quant à l'ovni de l'opus, "In Følva Felr", il offre un début plus calme et vaporeux, qui se mue en un gros jam répétitif mais intéressant. Ça nous change et surprend pour le coup, comme si Shamaatae nous présentait une facette plus « douce » et mélancolique de son sac à idées. J'aime bien.

Mais ce que je retiens avant tout de ce "Sviga Læ" est sa teneur en gras saturés, qui le distingue illico de ses vieux frères. Un bon flash de la part du seul maître à bord d'ARCKANUM, qui me fera me souvenir de cet album plus longtemps que bien des autres trucs Black que j'ai mieux notés. C'est ainsi.

Car si je préfère "Sviga Læ" à des dizaines de skeuds bien noirs, le coup de cœur est moins prononcé que sur "ÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞÞ". Il n'en demeure pas moins qu'il obtient la même note, 3,5/5, mais ajustée par le bas.

Pistes favorites : 1, 4, 5, 7.