LOUDBLAST pense à ses fans tout en s’inquiétant pour son avenir. Bien incapable de dépasser les frontières hexagonales en terme de popularité (malgré ses nombreuses escapades live en Belgique ou en Allemagne), le blond Stéphane Buriez et ses trois compères ont bien du mal à vivre de leur art. Souffrant de cette étiquette tenace de groupe français et malgré un Sublime Dementia tout à fait excellent, certains événements comme le passage du groupe en première partie de NAPALM DEATH à Londres n’auront à peu près rien produit comme effet en matière de ventes. Les quatre nordistes doivent se résigner à un double statut de plus gros groupe français de metal et d’illustre inconnu dans le reste du monde.
Ce disque permet donc aux Loods de ne pas se faire oublier de leurs chers fans qui seront ravis d’écouter ce premier live officiel de fort bonne facture.

Les premières secondes de l’introduction permettent de comprendre que la salle de concert à l’intérieur de laquelle a été enregistré le disque est de dimension fort modeste. Nous sommes bien loin des mouvements sonores de foules présents sur un Decade Of Agression ou un Live Shit. Cela à au moins l’avantage de la sincérité, LOUDBLAST n’ayant jamais rempli ni Bercy, ni le Parc Des Princes (à l’époque, le Stade De France n’était encore qu’à l’état de projet). On peut distinctement entendre les huit personnes s’époumonant en criant «Loudblast, Loudblast» lors du rappel.

Les trois premiers titres tirés de Sublime Dementia nous renseignent sur la qualité sonore de The Time Keeper. Les guitares sont puissantes et conservent le grain du quatrième album. La voix de Stéphane est assez claire et extrêmement propre, et trouve désormais en Max Cavalera une comparaison meilleure que celle de Barney Greenway. Les quelques retouches faites en studio à ce niveau ne sont pas vraiment de mon goût mais cela évite les couacs désagréables.
Le premier temps fort est cross the threshold et son appréciable annonce («on va vous parler un peu de sexe, maintenant!), un titre définitivement taillé pour les concerts.
Steering for paradise et shaped images of disincarnate spirits nous font remonter le temps jusqu’au très death metal Disincarnate.
No tears to share, compagnon de cross the threshold sur l’ep du même nom, supporte magnifiquement la concurrence avec son camarade et constitue un autre moment important.
Licensed To Thrash et Sensorial Treatment ne disposent que d’un seul porte-drapeau, ce malignant growth déjà dépoussiéré sur ce même Cross The Threshold, au contraire très représenté.

La présence du quasi-inédit this dazzling abyss (présent sur la compilation Brutale Génération) ne fait malheureusement pas oublier les absences des reprises de GBH et KISS (nos amis se rattraperont en 98) souvent jouées en concert et surtout de l’énorme et slayerien south of heaven, omis pour cause de coût exorbitant des droits d’auteur.

J’ajouterai un petit mot pour la pochette dessinée par Bolek Budzyn, savoureux cocktail d’influences flamandes et de science-fiction horrifico-pornographique. Je préférai son travail effectué pour Sublime Dementia mais son apport renforce toujours l’image du groupe.

Faisant office de best of (certes un peu précoce) pour les nouveaux venus, The Time Keeper est comme je le disais en début de chronique avant tout conçu pour les fanatiques de la formation la plus respectable de toute la scène metal extrême française, n’en déplaise à MASSACRA.