OH WOW ! Un album d’ALESTORM non encore couvert sur Nightfall In Metal Earth, mais qu’est-ce que c’est que ce binz ? Il faut dire que le combo a depuis quinze ans écumé plus que les sept mers avec son Pirate Metal enjoué. Pas moins de trois chroniqueurs ont usé leurs plumes à s’escrimer à conter les aventures de la formation : le regretté Bast, puis Dark Morue, puis Volthord s’y sont cassé les ratiches, partagés entre franche facétie, respect du fameux « premier degré et demi », et lassitude tant la formule a eu tendance à se répéter tel le naufrage du bateau pirate d’Astérix. Voici donc une quatrième vigie, votre humble serviteur, qui s’attaque aux déconnades sérieuses (ou aux consciencieuses conneries) de Cap’tain Chris et de ses moussaillons.

Il y a quelque chose d’ELECTRIC CALLBOY dans l’approche des Écossais. Non pas tant sur le style prodigué, mais sur le fait de cacher sous des habits de saltimbanques faussement débiles, un savoir-faire indubitable. Leur Folk Metal, ayant pour thème l’ensemble des clichés de la piraterie façon « Pirates des Caraïbes », est indéniablement bien caréné, que l’on évoque les mélodies, le rythme ou la variété des morceaux. Les paroles, le plus souvent hilarantes (de la Baltique), ne rendent pas justice à leur sens de l’écriture, d’une efficacité diabolique. Blindé de hooks de qualité et de refrains à beugler en chœur en festival, la discographie d’ALESTORM est riche en sommets.

Le problème avec ce concept est dans son énoncé : quand commence la blague et quand s’arrête-t-elle ? Comment se renouveler après six LP d’une qualité honorable ? Comment faire mieux que "Fucked With An Anchor", "Drink", "Magnetic North", "The Sunk'n Norwergian", "Nancy The Tavern Wench", ou encore "Mexico" ? Comment éviter la lassitude des fans, tout en leur offrant ce qu’ils souhaitent : du houblon, de la größe rigolade, et des airs gaéliques et allègres pour festoyer en troupe ?

Malgré la vanne et référence évidente à la masterpiece d’IRON MAIDEN, malgré l’artwork superbe, faisant référence à la Vierge de Fer en cachant ici et là un rappel des disques précédents ("Somewhere In Time"), malgré quelques nouveaux tubes à ajouter à leur setlist de tournée, "Seventh Rum Of A Seventh Rum" est probablement le moins bon album d’ALESTORM, et ce n’est pas sans peine que je partage avec vous, chers lecteurs, ce constat. Déjà un peu en bout de route sur "Curse Of The Crystal Coconut", malgré des "Chomp Chomp", "Fannybaws" drôlissimes, ou encore un "Zombies Ate My Pirate Ship" qui figure parmi les meilleurs titres jamais composés par nos flibustiers, la galette commençait à sentir un brin le moisi sur les bords.

"Seventh Rum Of A Seventh Rum" ne fait que renforcer cette désagréable impression qu’ALESTORM a fait le tour de ses propres océans musicaux et ne parvient plus à enjôler son auditoire. Cela fait longtemps qu’il ne surprend plus, c’est clair, mais le groupe parvenait toujours à nous sortir suffisamment de titres solides pour que le plaisir candide et régressif prenne le dessus à l’écoute de leurs ritournelles. Force est de constater que ce n’est plus le cas en 2022. Même la version deluxe, avec une reprise acoustique de chaque titre, puis une version chantée par des chiens (!!!) des mêmes pistes, exercice déjà éprouvé sur le bonus de "No Grave But The Sea", sent salement le réchauffé, pour ne pas dire le cramé.

Alors bien sûr, un "Magelan’s Expedition", un "Under Blackened Banners", ou plus encore l’irrésistible "P.A.R.TY." font honneur à l’histoire de Bowes & Cie, évidemment la présence d’Elliot Vernon aux claviers mais surtout aux growls -coré s’avère de plus en plus indispensable à la recette, mais sur la durée, on en vient à bailler poliment. Ils nous refont de coup de "Mexico" avec "Magyarország", en hommage à Bobo le gratteux hongrois (qui se défend pas mal au demeurant sur les soli), mais bon, Budapest et les boucaniers… Franchement, l’association ne coule pas d’eau de mer.

De même, les plans Ska, subtilement dosés auparavant, sont généralisés pour renforcer ce côté dansant, le plus souvent artificiellement. Sur le papier, je n’ai rien contre, bien au contraire, mais il y en a ici trop, sauf lorsque les racines Punk vient les complémenter avec une inspiration impromptue ("Cannonball"). ALESTORM tourne en rond, ne vise plus qu’à sortir de nouvelles chansons pour repartir en tournée où ils excellent, même si là aussi, ils peinent à se réinventer. Mais pour qui n’a jamais expérimenté la bonne humeur, « feel good », d’un concert des Britanniques, je ne peux que recommander l’effort. On en ressort avec une banane courant d’une oreille à l’autre.

Il n’en reste pas moins qu’ALESTORM se saborde allègrement avec ce "Seventh Rum Of A Seventh Rum". On espère un rebond, improbable, en 2024. Faute de quoi, il faudra sans doute trouver un cinquième pigeon pour aller couvrir la suite de la discographie.

Note réelle : 2,5/5, arrondi à la baisse malheureusement. Mais écoutez quand même "P.A.R.T.Y.", la chanson vaut le détour !

PS : "Wooden Leg (Part III)", "Return To Tortuga" : vraiment ? Allez au bout de vos idées les gars, il y avait mieux à faire, je ne sais pas, moi : "The Malvoyant", "Can I Play With Guinness", "Only The Sobers Die Young", "The Booze That Men Drink"...