Forts de la réussite du LP éponyme, les Bostoniens remettent le couvert à peine deux ans plus tard et visiblement, ne sont pas là pour trier les lentilles. Plus sombre, plus lourd également, "Awake" durcit le ton et assume plus encore ses influences Grunge, avec ce chant habité qui ne manquera pas d’évoquer à la fois James Hetfield (METALLICA) pour son timbre mais surtout Layne Staley (ALICE IN CHAINS) pour les lignes vocales et un certain maniérisme. Moins direct et fun que son effort précédent, GODSMACK gagne ici en substance ce qu’il perd (légèrement) en immédiateté, comme si le combo avait ressenti le besoin de s’acheter une Street Cred’ face au succès commercial rencontré par leur essai séminal.

Et ce n’est rien de dire que ça part très fort, avec une triplette d’ouverture de toute beauté : un "Sick Of Life" furieux, tout droit sorti de Seattle avec son intro à la basse bien sale, l’intemporel "Awake", l’un des meilleurs titres jamais composés par les Américains, et un "Greed" aussi Neo que Post Grunge mettent le paquet. Au menu : riffs bien syncopés, section rythmique qui groove sévèrement, et chant harmonisé comme à la grande époque. Ça cogne sévère, mais n’oublie pas de poser quelques petits leads malicieux, à grand renfort de wah-wah. L’entrée en matière est plus que savoureuse, a contrario de la pochette d’ailleurs, incontestablement la plus moche de leur discographie.

Mais il serait réducteur de se cantonner aux trois pépites qui lancent les hostilités. Si la suite est moins inspirée, elle n’en reste pas moins d’une belle efficacité, avec l’ajout de motifs tribaux ("Spiral") qui feront partie de leur signature et font écho à l’excellent "Voodoo" présent sur le précédent disque. "Trippin’" et surtout le pseudo instrumental "Vampires" avec sa voix-off (extraite d’un programme TV : "Mysterious Forces Beyond") qui semble tout droit sorti de l’univers de Rob ZOMBIE, peuvent aisément rivaliser avec les premiers titres. Presqu’exclusivement mid-tempo, l’album assume pleinement de prendre son temps pour placer ses ambiances autant que sa pesanteur.

La production a également pris sérieusement des poils, notamment au niveau des guitares, bien grasses malgré les aspects saccadés inhérents au style, ce qui est une petite prouesse, tout en ménageant des passages plus écorchés et lancinants que KORN n’aurait pas reniés. Franchement, celle-ci sonne toujours terriblement bien à mon sens, et nous rappelle à quel point la plupart des enregistrements actuels est impersonnelle, même si le son de la batterie de Tommy Stewart, qui signe ici son unique présence studio avec le groupe, ne sera pas au goût de tous et notamment la caisse claire bien sèche.

Ce "Awake" possède une véritable identité sonore et la qualité générale du rendu monte clairement d’une marche. Et puis, en tant que grand fan de lignes de basse, je dois avouer être plus que servi avec le travail de Robbie Merrill sur cet opus, celui-ci étant amplement mis en avant, tant au niveau du volume que de l’écriture, intros et ponts faisant partie intégrante de la structure des morceaux. Et c’est tant mieux car je peux vous assurer qu’il y a vraiment de quoi faire lorsque l’on prête l’oreille. Avis donc aux amateurs de quatre-cordes !

Non, au final, le principal reproche hautement subjectif que l’on pourrait faire à "Awake", au-delà d’un tempo un chouïa trop homogène, c’est surtout ce côté Neo persistent. Et Dieu sait que les détracteurs du genre savent faire preuve de mauvaise foi pour le démolir consciencieusement. La présence ici de soli, d’un groove incessant, d’aspects Grungy et du talent des protagonistes sauront-ils les faire changer d’avis ?

Note réelle : 3,5/5, cette fois-ci arrondie à la hausse ‘cos "I'm alive for you, I'm awake because of you, I'm alive, told you, I'm awake, swallowin' you"