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GODFLESH - A World Lit Only By Fire (2014)
Par ISAACRUDER le 15 Janvier 2015          Consultée 3832 fois

Si le titre de ce retour de GODFLESH est parlant et imposant, il aurait dû être tout autre. Le monde n'est pas seulement mené par le feu, non, Broadrick le sait, et même s'il reprend le titre d'un ouvrage historique de référence sur l'époque dite « sombre » du Moyen-Âge il ne suffit pas à concevoir ce qu'est la musique de GODFLESH dans notre époque. Non vraiment, cet album aurait pu – dû ? - s'appeler comme son ouverture : "New Dark Ages". Ce n'est pas le feu qui résume notre société occidentale, ou même le schème global des nations contemporaines, mais bien l'ignorance, le culte de l'ignorance, la recherche de l'effacement.

Il est tout à fait paradoxal de constater que notre monde baigne dans une hyper-communication insectoïde, que les éructations technologiques ne cessent d'envahir les espaces naturels indispensables à l'Homme, que ce soit la Famille ou la Terre, deux structures anarchiques qui posent problème à la domination des puissants, mais qu'en même temps, le savoir soit acculé puis mis à mort lors d'une curée réjouissante pour les élites, invisible pour les pauvres d'esprit, à qui le Royaume est heureusement promis. Monde de la facilité de la transmission, mais monde où tout se perd. Comme le disait Orwell, qui contrôle le passé contrôle le futur, qui contrôle le présent contrôle le passé. De fait, le retour de GODFLESH est symptomatique de cette évolution de la force d'une poigne tyrannique qui ne cesse d'écraser le bien commun. Et il est salvateur.

Car GODFLESH est indispensable à notre époque. C'est un groupe visionnaire, politisé – parfois trop aveugle sur certaines réalités – et qui, sous sa noirceur et misanthropie, dissimule une lumière. "Streetcleaner" était, et restera l'avatar ultime d'une société décadente et dystopique, de même que "Selfless" conjuguera la mélancolie et solitude du contemporain. "A World Lit Only By Fire", lui, vient synthétiser le savoir-faire de GODFLESH, et nous rappeler que nous sommes entourés de poison. Le son a changé d'abord, plus massif. Les guitares sont mises en avant, la basse vrombit ou se disperse en nuée d'insectes effrayante. Le chant de Broadrick reste martial et vengeur, limité à la stricte cadence d'un Indus qui projette toujours autant d'éclats noirs au visage. L'arrivée de la 8 cordes vient densifier un son déjà au panthéon de la lourdeur et du noir abysse. GODFLESH est, et reste un groupe moderne. En témoigne cet amour du groove, qui pourrait faire penser à du DEFTONES s'il n'était pas si travesti en avatar du rouage mécanique (l'excellent "Shut Me Down"). Les riffs sont simples, efficaces, porteurs d'un rythme qui n'est là que pour nous rappeler que nous sommes esclaves d'un instinct purement primaire, comme l'atteste l'excellent "Carrion".

Le marteau frappe l'enclume dans une cadence hypnotique lorsque "Life Giver, Life Taker" arme GODFLESH de davantage d'émotion. Si la description d'un monde où le fonctionnement mécanique de nos corps est piloté par les bas instincts de la consommation de masse s'évanouit donc au profit d'un symbolisme plus mystérieux et profond propre au groupe, c'est bien tard, et l'album, s'il enchaîne les morceaux vainqueurs (massif "Imperator"), tarde à extirper en nous le sentiment de voyage que l'on attend aussi. Regroupée dans les deux derniers titres, l'émotion plus subtile se sera fait attendre, le long d'un parcours riche en rythmes stakhanovistes et autres périls dignes de l'antre du Voreux. L'excellent "Towers Of Emptiness" rattrape cet état, titre partagé entre les deux personnalités de GODFLESH, avec ses guitares lourdes et la voix spectrale d'un Broadrick désincarné. La redondance pourra cependant poindre le bout de son nez à travers les simples "Deadend" ou "Curse Us All", qui sont les titres les moins travaillés en terme de samples même s'ils restent efficaces.

"A World Lit Only By Fire" est un album essentiel de 2014, non pas parce qu'il est le retour de GODFLESH, mais parce qu'il est un retour très réussi. On oubliera vite "Obeyed" et l'impression de se faire trop écraser au lieu d'être pris en tenaille, et le sentiment de répétitivité qui peut mordre notre esprit, et l'on saura apprécier à sa juste valeur un album excellent, qui rattrape les rênes de la modernité, tout en conservant le charme de ce qui faisait GODFLESH. Impérial, sombre et salvateur, c'est le lieu du supplice, froid, impitoyable, et sans pareil.

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Par ISAACRUDER




 
   ISAACRUDER

 
  N/A



- Justin Broadrick (chant, guitare, samples)
- G.c Green (basse)


1. New Dark Ages
2. Deadend
3. Shut Me Down
4. Life Giver, Life Taker
5. Obeyed
6. Curse Us All
7. Carrion
8. Imperator
9. Towers Of Emptiness
10. Forgive Our Fathers



             



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