Certains groupes, à l'image de certaines chaînes de fast-food trouvent la formule parfaite pour pondre des albums. C'est le cas d'AC/DC, de MOTORHEAD ou bien de MACHINE HEAD. Pour ces derniers, depuis "Through The Ashes Of Empire", la formule est à peu près la même à chaque fois. On s'attache à un style de production bien précis, à des compositions de morceaux bien définies, ou encore à des lignes vocales déjà testées et approuvées sur les précédents albums. Bref, la surprise s'évanouit au profit d'un produit correspondant aux attentes des fans, et suivant une équation définie à l'avance. Ainsi, en dehors du style propre au groupe, on retrouve à chaque fois la même formule, ou recette, ce qui permet d'éviter au groupe de sortir de sa zone de confort et de minimiser les prises de risque. Or, c'est ce qu'il s'est à mon avis passé avec GOJIRA et leur dernier né.

Avant de revenir plus longuement sur cet album, j'aimerais profiter de cette chronique pour soulever quelques questions. Combien de groupes français peuvent se vanter d'avoir joué au Stade de France? (à part Johnny...)
Combien de groupes français peuvent se vanter d'être parti en tournée aux États-Unis, ouvrir pour un des piliers de l'industrie musicale actuelle? Et combien de groupes français peuvent se vanter d'être en tête de gondole dans autant de pays différents? Il n'y avait qu'à faire un tour chez les grands disquaires londoniens à l'époque de la sortie du disque pour le constater. Alors, pourquoi aussi peu d'intérêt de la part du grand public en France? Pourquoi se farcir toujours les mêmes daubes au Grand Journal? Et en plus, les faire venir de l'étranger, alors que nous avons en France des gens qui défendent notre culture, bien plus selon moi que David Guetta. Si je peux facilement avouer faire partie de la "communauté Metal", j'ai tout de même du mal à comprendre que l'on ne commence pas à mettre en avant certains artistes. Surtout quand ces mêmes artistes nous sont enviés à l'étranger. Bref, cela fait partie de ce qui me dépasse.

Avec "The Way Of All Flesh", GOJIRA a explosé mondialement. Le statut du groupe est passé de celui de "groupe français", à celui de "groupe international". Joe Duplantier est parti s'installer aux États-Unis, le groupe a signé chez Roadrunner et est présent dans les plus grands festivals européens. Bref, la roue a tourné depuis leurs débuts. Avec ce même album, le groupe a trouvé sa formule, son propre son. Un univers sombre, intense, parfois violent, mais laissant toujours une porte d'entrée à l'auditeur. En cela, le travail effectué sur "From Mars To Sirius" a atteint son paroxysme. Mais la violence des débuts a laissé place à un environnement plus posé et solide. Une très belle évolution pour ma part.

Mais voilà, si d'un prime abord, cet "Enfant Sauvage" a tout pour plaire, il me laisse un goût amer dans la bouche. Si cet album m'a mis d'énormes claques lors des premières écoutes, cela a fini par laisser place à quelques interrogations. Et notamment celle ci: pourquoi avoir autant exploité le filon trouvé avec "The Way Of All Flesh"? Pourquoi avoir autant recyclé tous les gimmicks qui étaient déjà présents sur cet album? Je peux vous assurer que vous allez en entendre durant cet album, ces espèces de sweeping étouffés à la guitare,
propres au groupe et qui était déjà bien présents sur le précédent album. Pareil, vous allez en entendre des harmoniques artificiels. En un mot, GOJIRA recycle et nous pond ici un "The Way Of All Flesh II". Une suite, certes logique, mais qui laisse place à une simplicité un peu trop flagrante au niveau de l'écriture.

Et pourtant... Et oui, et pourtant. Nos Français s'en sortent plutôt bien. Sincèrement, comment ne pas être sous le charme du riff principal du titre "Explosia"? Ce titre, auquel revient l'honneur d'ouvrir l'album nous assène un énorme uppercut dans les gencives. Puissance. Tel est le mot qui nous vient à la bouche à l'écoute de ce titre. Puissance, mais également simplicité au niveau des guitares. Pas de riff alambiqué, c'est simple, ça va droit au but, c'est peu technique, mais ça fout l'ambiance. Le titre éponyme, "L'enfant Sauvage", se veut quant à lui être une sorte de mid-tempo rageur, et malheureusement un peu long. Sa rébarbativité fait que ce titre aurait pu être écourté d'une bonne minute. Et c'est bien le problème de l'album. Il semble globalement bien long. La faute surtout à Joe Duplantier selon moi. Il chante/hurle parfaitement. Mais, malheureusement, toujours de la même façon. Le peu de variations qu'il amène à son chant rend certains passages longs, voire ennuyeux. Il nous ressort la même formule sur chaque titre, ce qui a pour effet de lasser l'auditeur. On ne pourra en tout cas pas en dire autant de son frère Mario, qui tient la baraque avec une main de fer. Un des meilleurs batteurs mondiaux du moment, pour sur.

GOJIRA maitrise tout de même son sujet. A l'écoute des ambiances qui ressortent d'un titre comme "Mouth Of Kala", on ne peut que s'enthousiasmer devant l'énergie et l'angoisse que le groupe arrive à dégager. Tout cela est parfaitement exécuté et arrive à faire voyager l'auditeur sans problème. Et même si nous sortir une intro en tapping est une reprise de l'album précédent, on ne peut que s'incliner devant le côté majestueux(même si relativement simpliste) du titre "The Gift Of Guilt". Cependant, pour moi, la goutte d'eau qui fit un peu déborder le vase arrive sur "Pain Is A Master". On a à nouveau droit à la triplette swipping - harmonique artificiel - riff. Et ça en devient lassant, surtout après 8 titres déjà construits sur la même formule.

Vous l'aurez compris, pour moi, cet album est clairement bon. Malheureusement, GOJIRA n'a pas su assez se démarquer de son précédent album. Sans pour autant constituer une vraie suite, on se rend compte que le groupe a exploité à fond les gimmicks qui lui sont propres, quitte à fatiguer un peu l'auditeur. Donc, malgré ses indéniables qualités, ce nouveau GOJIRA reste à mon sens une petite déception.

Note réelle: 2,5/5