IN EXTREMO est un exemple que, dans certain pays, on peut être signé en major sans faire de la merde, et rentrer en troisième position des charts sans pour autant faire une musique tout-public. Un truc impressionnant qui évidemment n'arrivera pas de sitôt chez nous. Pourtant, j'aurais toujours du mal, dans une certaine mesure, à trouver un sens à cet engouement de folie pour la troupe allemande.

"Mein Rasend Herz" me rassure pourtant après la fanfare bouillie de "Sieben", et IN EXTREMO avait grandement de quoi renouveler sa recette, ne serait-ce que par l’emblématique "tube" du cd, "Horizont", titre imposant, avec un goût de voyage, en duo avec Marta Jandová (DIE HAPPY, inconnu de mes archives personnelles), exercice rappelant le moins connu et pourtant pas si mauvais LEZTZE INSTANZ. Le morceau aurait pu incarner un virage plus pop-rock (pas variétoche non plus) peut-être salvateur.
Mais IN EXTREMO, depuis ses débuts, n’a que peu changé. Sa production est plus ronde, moins rugueuse, ses mélodies plus en avant, il est plus rock et moins industriel, mais l’on reconnaît toujours cette obsession presque maladive pour les bombardes à tire la rigot, et des gros riffs de guitares qui se font pourtant rarement le centre d’interêt.

Sur "Mein Rasend Herz", tous les instruments reprennent leurs droits, surtout la harpe magnifique de Pymonte et les instruments à cordes (bouzouki et autres réjouissances)...et plus uniquement les plus craillards et éprouvants pour les oreilles (cf : ma chro de Sieben), même si cornemuses et chalémies restent centraux. Un bon point pour IN EXTREMO, comme c’est finalement dans cet album que le groupe utilise son panel d’instruments de la manière la plus complète qui soit. Bizarrement, certains morceaux à gros potentiels hymniques, comme "Nur Ihr Allein" subissent un traitement folklorique assez partiel… Inversement, le banal "Raue Spree" et le longuet "Mein Rasend Herz" semblent être étoffés de pleins de petits bidules trucs qui n’amènent vraiment rien de plus.

"Mein Rasend Herz" hérite tout de même de beaucoup de particularités de "Sieben". A commencer comme je l'ai dit par un ton plus rock et moins bourrin. Il en garde aussi le côté folk de parades militaires et cette grandiloquence orchestralo-folk assez monolithique ("Wesserbronner Gebet" par exemple)… où en gros ce qui me touche le moins dans les musiques folk. Cependant, tout ça apparaît plus dilué dans une variété sonore qui fait plaisir à entendre (malgré une homogénéité des structures un peu décevante).

On retiendra surtout l’accrocheur "Horizont", un "Macht Und Dummheit" plus direct (qui rappelle les meilleurs moments de "Sünder Ohne Zügel"), et le GRAND MOMENT de l’album, le froid-au-couplet, chaud-au-refrain, et complètement touchant "Liam", sans doute un des plus grands morceaux du groupe.

J’ajouterai peut-être un "Fontaine La Jolie" semi-acoustique assez feune, dans un français douteux… Et tous les autres me semblent plutôt écoutables, parfois très bons mais souvent soit trop banals dans leurs structures, trop longs ("Mein Rasend Herz") ou pas assez fouillés ("Nur Ihr Allein"). Les trois morceaux finals sont particulièrement difficiles à se farcir jusqu’au bout, faute à l'homogénéité de l'album.
Il est forcément dommage qu’avec autant de maturité et une capacité à rendre son élément folk ample et difficilement égalable en terme de polyphonie (difficile à dire autrement), IN EXTREMO n’arrive pas à se hisser de nouveau au sommet de son art.

(et entre parenthèse, je dirai que ce cd a quand même l’une des pochettes qui donnerait le plus envie d’acheter un album de folk metal teuton…)