Les trois premiers disques des RED HOT CHILI PEPPERS sont les moins connus, et ils ont acquis au fil du temps une aura quelque peu ... légendaire. Et peut-être aussi un peu surestimée. Ils forment une trilogie éclectique et très inégale, dans laquelle le pire côtoie ... disons le très correct. C'est une préhistoire assez méconnue dans la discographie des RED HOT, et qui demeure relativement obscure. Il faut dire que beaucoup des fans qui pinaillent sur By The Way ou sur le récent Stadium Arcadium du haut de leur grande expérience séculaire n'étaient même pas nés, loin de là, lorsque ces disques sont sortis. Et même pour ceux qui ont découvert le groupe avec les succès fusion du début des années 90, notamment avec "Blood Sugar Sex Magic", une carrière déjà longue semblait l'enraciner loin, très loin dans la décennie précédente : huit ans d'existence, trois disques avant "Mother's Milk", qui fit la jonction avec les RED HOT période « pleins aux as » grâce au carton de « Higher Ground ». L'imaginaire collectif a donc rapidement accolé une étiquette à la trilogie initiale.

Le premier est resté un peu méconnu, lointain. Et pour cause : il est assez médiocre. Le deuxième par contre, est depuis longtemps considéré - chose admise même par ceux qui ne l'ont jamais écouté - comme l'album le plus funk des RED HOT. Celui où, sous la houlette de George Clinton (un gars connu qui, semble-t-il, fait du funk), ils ont poussé le plus loin leur amour immodéré pour les FUNKADELIC, les SLY STONE et autres Curtis Mayfield. En bonne compagnie, donc, ils ont fait de Freaky Styley un disque assez unique dans leur discographie, témoignage des tâtonnements initiaux et d'une expérimentation funk-rock qu'ils n'ont jamais reproduite. Car c'est ensuite du côté du metal qu'ils se sont plus franchement tournés. Aux fans ultérieurs, les « Nevermind », les « Sex Rap » ou les « Blackeyed Blond » pourront alors sembler, malgré leur groove très fin et maîtrisé, un peu hermétiques. Dans l'ensemble, les compositions sont plus soignées que sur l'album précédent, et quelques guitares très rock sont visibles ça et là, comme sur « Battle Ship » ou « Catholic School Girls Rule ».

Mais on retiendra surtout quelques tubes qui ont marqué le répertoire du groupe, à la manière de « Jungle Man » ou de « Hollywood ». Sans négliger le petite perle cachée et oubliée, réservée à ceux qui acceptent de jeter une oreille sur Freaky Styley : « Vertle The Turtle » et son flow cool et lancinant. Les RED HOT ont toujours aimé le funk et le hip hop, c'est un fait. Mais ils n'en ont pas non plus été les rois. C'est pourquoi si ce disque, dans ses meilleurs moments, est un condensé agréable de rythmes dansants, de choeurs funky délicatement posés sur des guitares légères et une basse ronde et rampante, il ne s'agit pas non plus d'un chef d'oeuvre à exhumer absolument. C'est un disque intermédiaire, à l'image de son successeur : intermédiaire, c'est-à-dire infiniment distant du premier album des RED HOT - trop terne - et des disques qui suivront, plus durs, plus appuyés, et portés par un songwriting plus homogène. Si le groupe a tenté trois fois sa chance avant de percer, ce n'est pas non plus tout à fait par hasard. Freaky Styley : un album sympa, sans plus.