Il y a des fois où, en tant que chroniqueur, on se déteste de ne pas avoir pris le train à l'heure et d'avoir profité de la hype d'une sortie attendue, même si comme toute hype, elle est souvent exagérée. Et d'autres fois, on se félicite d'avoir attendu et laissé le train passer car la hype n'avait tout simplement pas lieu d'être. Comme beaucoup de grands groupes emblématiques de certains genres musicaux, OBITUARY a généré une vraie petite hype à l'arrivée de son onzième album studio, début janvier. Et comme l'éponyme de 2017 m'avait bien plu, j'étais plutôt enthousiaste à l'idée de rédiger rapidement ma chronique. Puis les mois ont passé, le temps s'est dilaté, les écoutes se sont espacées… mais l'enthousiasme, lui, n'a jamais reparu.

Reste, six mois après la sortie de "Dying Of Everything", un album moyen et totalement oubliable de la part des vétérans floridiens. Pourtant, les zigotos n'ont rien perdu de leur capital sympathie et c'est certainement ce qui mérite d'être souligné en premier. John Tardy conserve son chant caractéristique et il en fait toujours un argument décisif de ce pourquoi l'on choisit d'écouter le Death Metal d'OBITUARY. Et pas besoin d'attendre cent-sept ans pour retrouver avec bonheur son talent pour vomir des paroles toujours morbides à souhait. Le bonhomme est l'une des raisons qui font que l'écoute de ce nouveau longue-durée ne devient pas immédiatement désagréable ou mortellement ennuyeuse.

Prenons sa performance sur "Barely Alive" par exemple. S'il s'agit du meilleur morceau de l'album, c'est d'abord grâce à lui, car le vocaliste nous invite immédiatement et puissamment à chevaucher le riff up tempo sur lequel s'articule le morceau. D'autant que ledit riff est simple - comme toujours chez OBITUARY - mais d'une efficacité à toute épreuve. Allié au solo de gratte et à la section rythmique toujours menée à la baguette par Donald Tardy, bien secondé par Terry Butler, ce morceau d'ouverture, sous sa production maison toute "morrissoundienne" s'avère un formidable réveil-matin. Parfait pour sortir, à peine vivant, d'une nuit embrumée. Aussi, c'est avec confiance et plaisir que l'on se plonge dans "The Wrong Time", plus lent, plus lourd et plus répétitif mais qui commence à afficher les défauts de ce qui va suivre.

Car malgré des velléités parfois plus Thrash que de coutume pour un OBITUARY, répétition et simplisme sont deux des maîtres-mots de "Dying Of Everything". Des adjectifs qui collent depuis longtemps à la peau de la musique du quintette, me direz-vous, mais que le groupe parvient à contourner sans encombre lorsqu'il est inspiré. Or, dès "Without A Conscience", trop long pour son propre bien malgré seulement 4 minutes 28s au compteur, l'inspiration a foutu le camp. Et le groove qui marquait fortement l'album éponyme il y a six ans n'est plus de mise. Les guitares de "Without A Conscience" sonnent comme celles d'un groupe de Stoner en panne de beuh. Elles ronronnent en mode pilotage automatique et c'est fort dommage lorsque l'on considère les efforts que font John Tardy et Kenny Andrews pour nous faire tendre l'oreille. Cet OBITUARY "stonerisé" est bien plus appréciable sur "My Will To Live", qui traîne cependant trop en longueur.

"War" n'évoque absolument pas la guerre tant il est mou du genou lui aussi. Et beaucoup plus faiblard - en dehors du super solo au long cours d'Andrews - que n'importe quel morceau oublié de BOLT THROWER, tant qu'à citer un authentique maître de guerre. Et un "By The Dawn" donne justement envie de vite atteindre l'aube promise pour se réveiller du mauvais sommeil que nous inflige OBITUARY ici. La répétition à l'envi de riffs bas de gamme et sans personnalité plombe littéralement l'écoute de ce disque, à moins de ne considérer l'exercice qu'en musique de fond. Et qu'OBITUARY attaque pied au plancher ou qu'il ralentisse, le résultat est souvent le même, comme peut en témoigner le morceau-titre, qui s'étire inutilement et donne l'impression que ses 4 minutes et 40 secondes durent deux fois plus longtemps. Pénible.

Bref, il faut attendre au moins "Weaponize The Hate" pour retrouver l'envie de headbanguer gentiment sur quelques mesures pas trop chiantes. Et seulement "Be Warned" pour retrouver trace d'un vrai bon morceau, légèrement plus complexe et surtout fidèle au bagage musical qu'ont rempli les membres du groupe depuis sa création à la fin des années 80. Cette composition finale sent la décomposition, les tissus adipeux bouffés par les mouches… Et sa lourdeur pestilentielle, aux forts relents de Doom, est bienvenue à l'heure de dire au-revoir à OBITUARY pour quelques années supplémentaires. Voilà d'ailleurs une piste à creuser pour le combo américain. Après le Death'N'Roll groovy de "Obituary" il y a six ans, qui lui allait si bien, le groupe devrait oser un album complet de Death/Doom. Voilà qui n'irait pas à l'encontre de son style de Death inimitable mais tellement usé qu'on y voit des trous.