Quand à la fin de la décennie précédente, la rumeur se répandit que SYSTEM OF A DOWN avait enfin retrouvé le chemin des studios après une quinzaine d’années de « pause », à l’exception des quelques concerts visant à : 1) Faire plaisir à son public, 2) Remplir les caisses (rayer la mention inutile), l’excitation était à son comble. Shavo, qui n’avait pas fait grand-chose de sa vie depuis, en dehors d’ARCHOZEN, projet hip-hop avorté avec RZA du WU-TANG, en était tout émoustillé. Les autres membres apportèrent alors leurs maquettes et commencèrent à travailler ensemble dessus, pour vite s’apercevoir que les raisons du break étaient malheureusement toujours d’actualité. Les egos de Daron et de Serj étaient à l’évidence irrémédiablement incompatibles, et le projet s’effondrait instantanément de lui-même, laissant les fans consternés.

Mais notre Américano-arménien barbichu favori n’est pas du genre à se laisser abattre ! Puisqu’il en est ainsi, il décide d’enregistrer seul les chansons initialement préparées pour cette reformation, et les regroupe sous forme de l’EP "Elasticity", ici chroniqué et dont le nom fait maladroitement écho à "Toxicity". Si son premier LP de 2007, "Elect The Dead" reprenait plutôt convenablement l’histoire là où elle s’était arrêtée, la volonté est ici renouvelée : proposer des morceaux Metal/Rock, SOAD-compatibles, après avoir exploré d’autres voies au cours des dix dernières années (Jazz, Symphonique, bandes originales de films), pendant que son alter-ego et antagoniste favori Malakian officie dans la même veine sous l’étiquette SCARS ON BROADWAY. Si l’intention est louable, le résultat l’est malheureusement moins.

Si les six tracks composant l’EP (dont une version alternative de "Rumi", du nom de son fils, dont l’intérêt m’échappe encore à ce jour) constituent des pièces acceptables, force est de constater que la passion pour ce style de musique s’est tarie chez l’ami Serj. Tout semble ici forcé et en manque cruel d’inspiration. Dans une sorte d’auto-plagiat, l’introductif titre-track singe les mimiques qui firent pourtant le succès des premiers opus du combo, la magie en moins. Musicalement parlant, au niveau des instruments, c’est extrêmement faible et sans aucun intérêt, en dehors de quelques tentatives orientalisantes sur "Your Mom". Au mieux, "Electric Yerevan" et ses arrangements vaguement électro évoqueront chez certains le "Old School Hollywood", l’un des moins aboutis de "Mezmerize". C’est vous situer le niveau.

La folie semble artificielle, feinte, tout comme cette volonté d’auto-harmoniser ses pistes vocales comme à la grande époque, sans atteindre la profondeur que parvenait à créer la complémentarité des timbres entre Daron et lui. Restent les mélodies que lui-seul parvient à créer ("Rumi"), qui auraient pu trouver leur place sur "Steal This Album" avec de meilleurs arrangements et une écriture plus recherchée.

Il est également triste de constater combien la voix de Serj devient de plus en plus nasale, notamment lorsqu’il monte dans les aigus. Excellent chanteur malgré tout, il suit la trace d’un Myles KENNEDY qui sonne de plus en plus comme Axl Rose (version 2020). Cela n’empêche pas les titres d’être audibles, mais de là à les imaginer figurer sur un LP de SOAD relève davantage de la série B Netflix que des chef d’œuvres intemporels de Science-Fiction. Tout n’est pas à jeter sur "Elasticity", mais le sentiment qui prédomine reste indubitablement la déception.

La flamme est éteinte pour de bon, et avec elle l’espoir de revivre cette émotion incomparable que ces légendes ont su provoquer chez nombre de personnes dans le monde, en témoigne le cap du milliard de vues passé par le clip de "Chop Suey" sur Youtube.

RIP SOAD. Que Serj passe à autre chose, c’est sans doute mieux pour tout le monde.