Moi, j’aime bien ça les MOF. Je trouve même qu’ils puent la classe avec leurs grands tabliers blancs à col bleu-blanc-rouge, symboles d’un savoir-faire à la française issu d’une culture millénaire d’excellence (a minima). Ça me donne envie de crier « cocorico » et de planter un drapeau tricolore de facho dans ma jardinière de fortune ne contenant plus que de la terre et des araignées depuis trois ans à ma fenêtre. Meilleurs Ouvriers de France, ça n’en jette pas un peu, quand même ? Bon, en l’occurrence, on est loin du Metal à la SORTILÈGE ou NIGHTMARE, mais plutôt dans des influences on ne peut plus ricaines, il convient de le reconnaître.

La (relative) renommée du combo vient d’abord de celle de son guitariste, Reda Boucher, ioutioubeur de son état sur la chaîne « Le Campus Musique De Reda », qui nous partage régulièrement ses plans de tueur avec humour en décryptant l’actualité de son instrument favori et en débunkant les imposteurs des réseaux sociaux. Le gars a l'air sympa et doué, c’est un fait. Et il aime surtout musarder à travers de nombreux courants musicaux, car ce n’est pas uniquement de Metôl dont il s’agit ici. "Outsiders" verse en effet aussi bien dans le Rap (ne fuyez pas tout de suite) que dans le Nu (le Metal hein, pas le genre artistique représentatif), le Metalcore, ou le Prog à tendance Djenty. Imaginez une copulation lubrique entre EMINEM (dont ils reprennent d’ailleurs ici le "Lose Yourself" de manière un peu trop évidente mais néanmoins efficace, y adjuvant une bonne dose de poils), FALLING IN REVERSE et POLYPHIA, et vous ne serez pas loin du résultat, ma foi.

Les petits gars d’Aix-en-Provence expérimentent joyeusement autour de leur fondateur qui s’en donne à cœur-joie pour montrer son savoir-faire et une jolie palette de sons que l’on peut sortir d’une six-cordes, sans jamais donner l’impression d’être en démonstration. Le bougre a indéniablement du talent, mais ce n’est pas le seul. Florent (qui vit pour sa part outre-Atlantique) au chant a également fière allure, possédant un spectre vocal extrêmement large. Autant à l’aise sur les versants Pop qu’Extrême ou Hip-hop, sa prestation tout au long de ce premier opus est tout simplement bluffante, tout comme celle d’Alex derrière les fûts.

Dans la diversité des pistes, des arrangements funky de basse également, du bordel contrôlé, j’y retrouve aussi la versatilité du "Tight" de SPIRIT BOMB, qui m’avait bien plus il y a de cela quelques années, en moins foufou cependant. Car de la maîtrise, il y en a à revendre sur "Outsiders", et pas qu’un peu. Passer ainsi d’un genre à l’autre, quand les courants ne sont pas tout simplement fusionnés au sein du même morceau, ce n’est pas donné à tous les musiciens. Les premières écoutes s’avèrent franchement déstabilisantes, on se surprend à apprécier une piste féroce et à réfuter la suivante car trop cheesy : il faut un peu de temps pour s’adapter à l’ensemble et l’apprécier comme un tout consistant, un peu à l’instar du "Popular Monster" de FALLING IN REVERSE, même si Reda et sa clique ne versent jamais dans le côté putassier de la bande à Roro et que le travail sur les grattes est bien plus recherché et abouti. Il n’empêche que ce pot-pas-pourri d’influences laissera sans doute plus d’un lecteur circonspect à l’écoute de la bestiole.

La cohérence du tout vient sans doute de cet enchevêtrement réfléchi, renforcé par une production moderne mais très précise et efficace, tant sur les plans de guitoune ou les arrangements, parfois électroniques aux claviers relativement discrets, que sur les murs de son à la LINKIN PARK ("B.C."), assez remarquablement restitués. J’imagine, peut-être à tort, que c’est auto-produit, mais si c’est le cas je tire mon chapeau au groupe pour être parvenu à ce résultat dans ces conditions. Si je me trompe, n’hésitez pas à éclairer ma lanterne sur ce point dans les commentaires, et notamment SB qui m’a suggéré cet album dans la Boîte à Demandes et que je remercie au passage pour la découverte. Ayant kiffé contre toute attente "Popular Monster" (oui, j’y reviens), je ne peux qu’apprécier ce taf d’orfèvre et l’ambition d’une formation bien de chez nous évoluant dans un registre comparable.

Alors oui, il y a bien des gros refrains de Metalcore en voix claire qui fleurent l’excès de saccharose cristallisé, mais comme vous le savez maintenant, ça ne me dérange pas plus que cela dès lors qu’on n’entre pas dans les poncifs de mélodies éculées, ce qui n’est pas franchement le cas sur "Outsiders". Ouf ! L’honneur de l’institution des MOFs est sain et sauf, et l’on peut profiter pleinement de ces quarante minutes de musique sincère et prometteuse, auxquelles il ne manque qu’un ou deux tubes en mode earworm pour faire de ce disque une réussite totale. Le plaisir, lui, est bel et bien là !

Note réelle : 3,5/5.