Musicalement parlant, "Clairvoyance" avait du potentiel, alliant avec brio une ambiance bien mise en place combiné à la belle voix de Lanegan aux allures de Morrison. Le son laissait toutefois à désirer, de même que l’inspiration qui avait été placée à de nombreuses reprises aux oubliettes. Malgré tout, SCREAMING TREES montrait qu’il pouvait aller loin, avec l’aide de temps et de moyens. J’imagine que c’est un peu pour cette raison que le petit label SST Records a signé le groupe. Logiquement, avec des finances majorées, les gars pouvaient maintenant mettre en place un deuxième album de meilleure qualité.

"Even If And Especially When" arrive donc dans les bacs en cette année 1987, une époque encore bien lointaine des sonorités Grunge qui feront les belles années des gars par la suite. SCREAMING TREES reste donc dans la même veine empruntée lors de ses débuts malgré quelques nuances. En effet, quelques changements sont vite remarqués dès que l’on jette un petit coup d’œil sur la pochette (très laide, il faut l’avouer) : la durée des titres a été revue à la baisse, jetant aux oubliettes les ambiances du premier essai. De plus, si "Clairvoyance" avait un mélange égal entre Garage Rock et Rock Psychédélique, "Even If And Especially When" fait pencher la balance vers le Garage Rock, emportant donc les plus longs morceaux et l’expérimentation. Il va sans dire que la difficulté à différencier les titres les uns des autres est donc totalement présente, quelquefois la durée d’une chanson étant seulement de deux minutes.

Vocalement parlant, Lanegan décide de s’éloigner légèrement de notre Jim national pour tendre vers un chant un peu plus diversifié mais toujours aussi aérien. Le bougre est maintenant et très clairement le meilleur atout des SCREAMING TREES, les autres ayant peine à suivre le talent du monsieur. Les frères Conner enfilent les riffs sans vraiment en faire ressortir quelque chose de vraiment efficace. Comme mentionné précédemment, les morceaux sont tellement ressemblants qu’il est très difficile de vraiment faire ressortir un titre parmi les autres. Normalement, ceci n’est pas nécessairement un problème en soi, certains albums concepts sont d’ailleurs affublés de cette caractéristique, mais pour que ceci soit un avantage il faut que la qualité des compos soit au rendez-vous, ce qui est bien loin d’être le cas avec le deuxième méfait du groupe. Pire encore, j’ai la forte impression qu’il s’agit d’un recule face à "Clairvoyance" : celui-ci avait au moins l’avantage de proposer une belle ambiance avec des morceaux quelques fois un peu maladroits, mais j’applaudissais la tentative des gars d’avoir proposé certaines expérimentations même si celle-ci tombait régulièrement à l’eau. Ici, aucune tentative n’a vraiment été tentée avec des morceaux hyper directs sans âme réelle.

Commercialement parlant, SCREAMING TREES avance vers un meilleur Label et de meilleures tournées. Malheureusement, "Even If And Especially When" ne comble pas les attentes en faisant reculer la mince progression des hommes de Washington. Le groupe reste donc dans un certain anonymat et continue son petit bonhomme de chemin dans une indifférence quasi totale.

Morceau Préféré : En faisait un effort, "Cold Rain".