Tout bon metalhead se doit d’avoir testé ses limites, non pas pour se la péter, juste pour être bien certain de ne pas passer à côté de quelque-chose d’essentiel. Pour ma part, je ne suis pas né fan de BENIGHTED, j’ai lentement appris à apprécier des groupes de plus en plus violents. Les groupes suivants m’ont tout d’abord rebutés (ils sont restés longtemps au-delà de ce que je pouvais accepter) puis m’ont ouvert l’esprit sur de nouveaux horizons, dans l’ordre : SOAD, TOOL, IN FLAMES, PANTERA et NILE. Je considère que tant que l’on trouve qu’une musique est brutale, on ne peut l’apprécier complètement, au mieux on est fasciné, au contraire, quand vient le moment où l’on aime proprement un disque, on en oublie la brutalité.

Tout ça pour dire que après NILE, je me pensais armé pour écouter tout et n’importe quoi sans ressentir une sensation de rejet lié à la violence d’un morceau. Mais c’était me fourrer le doigt dans l’œil, ma première écoute de "Concubine/Fault and Fracture" m'a bien refroidi, que de férocité ! Moi qui voulais découvrir CONVERGE via "Jane Doe", c'était mal parti ! Plutôt que de forcer, j'ai cherché des moyens détournés, notamment essayer d'autres disques, les jauger, puis revenir à "Jane Doe", voilà comment j'en suis venu à cet album.

"No Heroes" a été ma porte d'entrée royale à CONVERGE, malgré des structures proches de "Jane Doe", dès la première écoute ce disque m'a enchanté, je n'en reviens toujours pas ! Il faut dire aussi que "Heartache" commence très bien l'album, une intro grasse sur un tempo lent avec un riff simple, soudain une accélération de malade et les hurlements qui viennent se rajouter. Et le morceau est déjà fini ! C'est le vers de terre qui s'agite délicieusement devant nos yeux de merlan, il nous le faut, on ne peut s'empêcher de mordre à l'hameçon. "Hellbound", "Sacrifice" et "Vengeance" viennent définitivement nous ferrer en restant dans le même style : violent, rapide, sale. Ces quatre pistes s’enchaînent parfaitement, sonnent on ne peut plus CONVERGE, c'est jouissif, et ça ne perd pas en saveur après être devenu fan de "Jane Doe". Une fois bien harponné, vous ne pouvez plus reculer, CONVERGE profite de "Weight Of The World" pour vous traîner sur la berge du Postcore. Mais c'est de courte durée, avec "No Heroes" CONVERGE vous attrape et vous laisse vous débattre avec ce brûlot affolé, jusqu'à ce que vous soyez fatigué. Après, généralement on enlève l'hameçon et on jette le poisson dans un seau d'eau, mais là j'ai conscience que ma métaphore est lourde, alors je vais l'arrêter là. Après ce début d'album lessivant tellement tout est rapide, agressif, on arrive à "Plagues" un morceau lent, lourd et lancinant qui fait la charnière avec les derniers morceaux qui contiennent beaucoup de passages postcore, calmes et chargés en mélancolie. Le chant clair de Jonah Jenkins sur "Grim Heart" est excellent, triste, émouvant, mais celui de Bannon n'est pas mal du tout non plus. Ne vous méprenez pas ça reste du CONVERGE classique, ça n'est jamais tendre, juste que la seconde moitié de l'album est d'avantage spleen.

Depuis "Jane Doe", Kurt Ballou ne s'est pas relâché, il a donné de sa personne pour garder la qualité constante, et si "You Fail Me" étais très bon, l'album présent est un véritable second "Jane Doe". Et comme tous les cadets, son aîné lui fait de l'ombre, l'originalité restera l'apanage de "Jane Doe", "No Heroes" c'est juste l'album qui dit que CONVERGE ne se repose pas sur ses lauriers, "Quand tu veux, je te ponds un album excellent, mec !".

CONVERGE kills, again, in space ! En sortant le troisième grand album de leur carrière, ils se placent définitivement parmi les références du Hardcore et confirment qu'ils sont loin d'avoir dit leur dernier mot.