Le 14 Octobre 2006, alors étudiant fraîchement débarqué à Édimbourg dans le cadre du programme Erasmus, votre humble serviteur se rend au Cabaret Voltaire, club bien connu des résidents pour être en fait une sorte de cave, tenue par une voûte en pierre, et capable d'accueillir tout au plus une cinquantaine de personnes. En cette soirée d'automne, donc, les tout jeunes Nord-Irlandais de THE ANSWER viennent défendre leur premier album, "Rise" (qui rencontrera le succès que l'on sait) en première partie de ROADSTAR (qui deviendra HEAVEN'S BASEMENT quelques années plus tard). Le quartet vole littéralement le show à sa tête d'affiche, et retourne l'esprit de tous les spectateurs présents grâce à son Hard Rock bluesy à la fois énergique et éthéré, transcendé par un chanteur particulièrement investi.

7 ans plus tard, le soufflet est un peu retombé. La première partie d'AC/DC lors du BLack Ice Tour n'aura pas permis au groupe de pérenniser sa fragile renommée, et voici nos chevelus forcés de se battre, à nouveau et plus férocement que jamais, pour tenter de faire connaître sa formidable musique au plus grand nombre. Car vous l'aurez compris à la vision du nombre d'étoiles qui agrémentent cette chronique, "New Horizon" est un chef-d'oeuvre. Ni plus ni moins. Il est enfin temps de reconnaître l'immense apport de ces quatre chevelus à la scène Hard Rock actuelle, ainsi qu'un talent sans faille qui accouche de ces 10 nouveaux titres avec une facilité qui semble tout à fait naturelle.

Les gros noms qui accompagnent l'album ne sont pas de simples arguments publicitaires. Storm Thorgerson, regretté graphiste qui livre là son dernier travail, Toby Jepson (SAXON, FASTWAY) à la production, et Mike Fraser au mixage (déjà responsable de celui de "Everyday Demons") ne jouent pas les cache-misère, mais participent au contraire à la construction de l'album, à ces "à-côtés" qui mettent parfaitement en valeur des morceaux parfaitement construits et très inspirés. THE ANSWER, en effet, parvient à mêler son savoir-faire acquis ces dernières années avec une énergie brute et juvénile, une formule qui transforme l'album en un véritable joyau. "New Horizon", qui ouvre l'opus, fait valoir, tout comme les autres titres, un sens inné de la mélodie et du refrain qui tâche, couplé à un savoir-faire indéniable en matière de riffs acérés, quelque part entre Hard Rock et Blues.

Il y a comme une impression de maîtrise totale, d'apaisement, qui se dégage de cet album. Comme un met de choix, "Call Yourself a Friend" évoque la classe d'un "While My Guitar Gently Weeps" avec ses arpèges couplés à une délectable montée en intensité. Dans l'énergie pure, "Somebody Else", "Concrete" et ses sonorités modernes, ou "Burn You Down", sa ligne de basse groovy et son riff gras se posent là, et donnent l'impression d'écouter un best-of des travaux passés du groupe. Tout ici paraît à la fois spontané et millimétré, extirpé des tripes comme un besoin irrépressible de faire du Hard Rock.

Il y en a pour les stades ("Scream a Louder Love", quel chef-d'oeuvre tubesque !), il y en a pour les clubs enfumés, où l'on se dandine jusqu'à n'être plus qu'une masse de sueur ("Leave With Nothin'"), il y en a surtout pour toute personne sensible à la voix exceptionnelle, à la fois claire et saturée de Cormac Neeson, dont les intonations aiguës peuvent évoquer les envolées d'un certain Robert Plant. Sans trop en faire, THE ANSWER parvient à livrer un album dont la durée idéale (10 titres) et la variété des morceaux en font un album délicieusement imparfait dans sa perfection. Du grand art et un album tout simplement monumental.

Note réelle : 4.5/5.