C'est impressionnant de voir comment des groupes évoluent rapidement dans leur période charnière (i.e. entre le troisième et cinquième album comme c'est justement le cas ici), comment leur son s'affine, leur personnalité s'affirme et leur style prend de l'ampleur.

Le Death Mélo des Finlandais d'OMNIUM GATHERUM sur "New World Shadows" est puissant, épique, un brin progressif, lourd et vaporeux à la fois, dans un mélange d'une grande qualité. Trois ans plus tôt, avec ce "Redshift", le groupe n'offrait… qu'un bon disque de Death Mélo, bien ambiancé, mais générique, gentillet, sans plongeon dans le vide. Un monde le sépare de son successeur, comme quoi un sérieux éveil a eu lieu. Et entre vous et moi, des skeuds de Death Mélo qui ne réinventent pas le genre à leur façon, comme "New World Shadows" le fait, on peut facilement les tasser dans un coin.

C'est ce que j'ai bêtement envie de vous conseiller de faire avec "Redshift" tellement la formule sent le réchauffé. Des plans sympathiques, des guitares bien vivantes et souvent funny, oscillant entre l'agression totale et les gémissements lumineux sensés nous insuffler le contenu d'une bombonne pleine d'espoir et de bonheur. Tout ceci pour évidemment contrebalancer les riffs rondouillards et mélancoliques, sous couvert de claviers planants lorgnant vers des sonorités futuristes familières. Ces claviers seront mieux utilisés dans l'effort suivant, alors que "Redshift" mise davantage sur les guitares et la grosse voix du chanteur Jukka Pelkonen, qui sait quand même varier les timbres pour se faire entendre. Donc, en général, on a droit à cette bonne vieille recette, en n'oubliant pas les pièces inutiles comme "Greeneyes" (oh putain, la daube !) ou "Song for December".

Là où "Redshift" se rapproche de la meute du Death Mélo est au niveau, vous l'aurez deviné, des refrains. Des refrains se voulant fédérateurs, pas au point d'accoter un DT, mais au point qu'on se souviendra de plusieurs plages juste à cause de ça. Je pense notamment à "Nail", "Chameleon Skin" et "No Breaking Point". Cependant, il sait aussi faire lever les sourcils avec des morceaux comme "The Return" ou des riffs tels que celui de "Shapes And Shades", inquiétant, ou l'agressif "The Redshifter". Même "Distant Light Highway" montre des signes encourageants de la trajectoire qu'empruntera le groupe… Dommage par contre que ces trouvailles plutôt modestes se retrouvent noyées quelques secondes plus tard dans une marée de guitares convenues brisant l'ambiance sombre de départ. C'est d'ailleurs un peu comme ça d'un bout à l'autre du disque ; on croit détenir une perle et hop, légère déception liée à des choix de composition qui ne conviennent pas toujours. Et les soli de qualité se comptent sur les doigts d'une main…

"Redshift" n'en demeure pas moins un album solide, comportant son lot de bons moments. Sauf que dans un genre aussi joué que le Death Mélo, aussi marqué par les géants, les groupes doivent trouver un petit-quelque-chose de fameux pour se différencier. OMNIUM GATHERUM a réussi cet exploit avec "New World Shadows" (avec un nouveau bassiste et guitariste d'ailleurs, ceci expliquant peut-être cela), alors que "Redshift" s'avérait un tremplin vers ce nouveau sommet ou simplement un adieu à sa première identité.

Je suis très heureux de leur décision d'avoir tourné la page, car il est évident que les Finlandais ont du talent ! Il était simplement mal utilisé.