Parfois, l’opportunisme a du bon. Savoir capter le style du moment et taper pile dedans sans pour autant tourner le dos à son ADN est plus difficile qu’il n’y parait et à ce petit jeu, PRONG s’est montré très efficace. Après un "Cleansing" qui lorgnait déjà du côté d’un PANTERA, "Rude Awakening" franchit complètement le pas. Travaillant à nouveau avec Terry Date (qui aura contribué à forger le son de la bande des frangins Darrell), le groupe de Tommy Victor va signer un album de Groove Metal intelligent.

La production est donc énorme et les claviers, tenus par un certain Chalie Clouser (NIN) s’intègrent parfaitement dans cette œuvre ou comme d’habitude, les soli sont ce qu’il y a de moins captivant. En même temps, s’il y a bien un truc qui ne bouge pas avec PRONG, c’est bien ça. Victor est un riffeur de premier ordre, doublé d’un bon mélodiste (les titres bourrins pour être bourrins ne sont pas légion à ce moment là), mais l’aspect soliste de son art ne semble pas trop l’interpeler, ce qui permet aux morceaux d’être assez concis dans leur ensemble.

Et à partir de là, nous ne parlerons plus que d’efficacité. Une efficacité monstrueuse, qui transpire sur chaque titre. Puis il y a cette ombre Industrielle qui vient apporter un vent glacial sur le Metal de PRONG, de façon plus ou moins perceptible en fonction des morceaux ("Close The Door" est un bel exemple, où l’on reconnait très bien la patte de Clouser). Et ce qui est remarquable, c’est que la section rythmique délivre un groove monstrueux, nous ne sommes pas sur de l’abattage de double grosse caisse tout ce qu’il y a de primaire, il y a un superbe travail à ce niveau et pourtant le groupe parvient à développer une ambiance glacial à l’image de cette splendide pochette (peut-être bien la plus belle qu’ait eu le groupe. Bon, la concurrence n’était pas non plus très rude).

Avec le temps, seul le title track est vraiment resté dans les mémoires, avec sa mélodie infaillible et son riff à la fois heavy et lancinant, propulsé par un Victor qui module de plus en plus et surtout, de mieux en mieux sa voix, en laissant pour une fois ses origines Hardcore de côté. De fait, "Rude Awakening" est certainement et paradoxalement le disque le plus facile d’accès pour le néophyte qui y trouvera son compte. Cependant, à la surprise générale, cet album n’allait jamais décoller dans les charts, alors qu’il avait les ingrédients pour réussir à s’imposer face aux cadors de l’époque, les FEAR FACTORY et autres PANTERA, avec en prime une finesse dans l’écriture qui pouvait faire défaut à ces deux formations.

Et le réveil fut effectivement rude pour Tommy Victor, le groupe et les fans puisque la formation splitta peu après. Et jamais la reformation, sans Ted Parsons derrière les futs, ne parviendra à vendre autant de rêve.