Si un changement de chanteur représente souvent un pari risqué pour un groupe (les exemples de ratés sont légion), ce ne fut heureusement pas le cas pour FIT FOR AN AUTOPSY (FFAA). L’arrivée en 2015 de Joe Badolato derrière le micro fut l’élément déclencheur d’une évolution marquée du style précédemment prodigué par les Américains de Jersey City, passant d’un Deathcore des plus brutaux à une version plus recherchée et lorgnant vers des rivages quasi-progressifs sur ce "Oh What The Future Holds". Si "The Sea Of Tragic Beasts" marquait déjà un changement notable et artistiquement accompli, ce nouvel album enfonce le clou, et plutôt deux fois qu’une.

La violence n’est pas absente de ce cinquième essai, loin de là, mais elle est enrichie d’harmonies bien senties, magnifiées par le travail de production de Will Putney, guitariste et grand ordonnateur du combo. Le chant est quant à lui extrêmement versatile, sachant se montrer dévastateur sur les parties growlées ou plus planant sur les parties claires (on pourra comparer ces derniers passages au timbre de Joe Duplantier). Une véritable réussite donc : le chanteur n’a jamais été aussi bon et à propos que sur cet opus. Puisque l’on évoque GOJIRA, attardons-nous sur cette filiation, tant celle-ci est flagrante sur certains morceaux, dont le titre "Far From Heaven", sorti en single. Entre simple inspiration, signe de l’influence grandissante des Landais sur la scène Metal mondiale, ou honteux plagiat, je préfère opter pour la première option, mais je conçois que l’on puisse discuter de la chose. Cela fait d’ailleurs quelques années que l’on retrouve des traces gojiresque chez FFAA, et on saura leur être gré d’avoir digéré ces influences pour nous asséner une version plus agressive de ce que proposent les Frenchies depuis plus de deux albums désormais. Le monstre a laissé une place vacante en se recentrant sur une musique plus accessible, FIT FOR AN AUTOPSY compte bien s’en emparer. Et pour insister sur cette comparaison, Josean Orta mérite également d’être ici mentionné au vu des parties de batterie proposées tout au long de ces 45 minutes de brutalité maîtrisée, même s’il ne possède sans doute pas la finesse du jeu de notre Mario national.

Cet album est tout simplement excellent, du début à la fin, sans aucun temps faible. La tracklist est intelligemment pensée, l’agencement des titres ménageant de courtes pauses dans l’agression à bon escient, comme cette magnifique introduction sur le progressif mais toujours tendu "Two Towers", avant d’enchaîner avec le parpaing "A Higher Level Of Hate". L’apparente simplicité des compositions cache un travail de recherche ahurissant, pour qui se donnera la peine d’écouter au casque avec attention l’album. Le son, massif et lourd comme rarement, n’écrase pas les nombreuses recherches mélodiques. Cette précision est à porter au crédit du producteur star, qui exerce désormais derrière la console pour les plus grands du genre (THY ART IS MURDER, BODY COUNT, EVERY TIME I DIE). Espérons que son bébé connaîtra à présent un succès amplement mérité au vu des immenses qualités de ce "Oh What The Future Holds".

Note : 4,5/5, jouissif !