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DEATH METAL  |  STUDIO

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EDGE OF SANITY - Crimson (1996)
Par CANARD WC le 21 Mai 2012          Consultée 5582 fois

C’est marrant de voir les encyclopédies vivantes que sont devenus les jeunes hardos de nos jours. Internet permet à une personne un tant soit peu intéressée de se faire très rapidement un avis précis, argumenté, plus ou moins éclairé en quelques clics sur tout et n’importe quoi (surtout sur n’importe quoi). Suffit de « Google-iser » un peu et vous finissez par trouver toutes les infos utiles en un rien de temps. Cette « omniscience » est la conséquence directe de l’avènement du « downloading » et de la dématérialisation de la musique (j’ai essayé de faire une phrase intelligente).

Car dans le temps (enfin y a pas si longtemps non plus, faut pas déconner), il était juste impossible de tout écouter, de se tenir aussi bien informé de l’actualité ou encore d’avoir une vision complète des choses : il fallait impérativement acheter les albums ou se débrouiller pour se les faire prêter. Il « fallait » avoir un bon réseau de potes hardos, mais attention un vrai « réseau », avec des contacts physiques et oraux et du vrai temps qu’on passe à papoter avec des gens en chair et en os qu’on peut toucher et tout le bordel. Bref, si vous ne faisiez pas partie d’un « clan », vous étiez condamné(e) à écouter les mêmes trucs en boucle.

Conséquence directe de cette limitation « naturelle » à la connaissance : tout le monde racontait beaucoup de conneries et la contradiction n’existait quasiment pas. Tout le monde ne connaissait pas par exemple TOUS les albums de MAIDEN. Le simple fait de bien maîtriser les « 4 grands du Thrash » suffisait pour passer aux yeux de tous comme un « expert es Thrash ». Si en plus vous connaissiez des trucs comme EXODUS, KREATOR ou DEATH ANGEL, tout le monde fermait bien sa gueule quand vous balanciez vos vérités, vu que personne en face n’était en mesure de contre argumenter.

Bref, c’est dans cette époque obscure, pleine d’approximations et de jugement superficiel qu’est né le Death Metal. Historiquement, le genre a émergé fin des années 80. Les premiers chroniqueurs spécialisés sont apparus un peu avant dans les mags (qui se souvient de Phil Pestilence ?) et les petites radios diffusaient à des heures indues quelques morceaux venus d’ailleurs. Mais concrètement par chez nous (en France), on en a vraiment parlé qu’au début des années 90. Le Death Metal a déboulé en hurlant, en faisant peur, en donnant un coup de vieux à tout ce qu’on avait entendu. Comment faire plus ? MORBID ANGEL, DEICIDE, OBITUARY et toute la vague française (MASSACRA, LOUDBLAST…) frappaient fort, lourdement et le sol tremblait. Les mecs de MORBID ANGEL donnaient des interviews paranormales, les pochettes de DEICIDE faisaient peur et Hard Force Mag’ prédisait un tremblement de terre sur la planète Metal échelle de Richter 18 (SLAYER étant à 10…). C’était la fin du monde – assurément - et le Metal ne s’en relèverait pas.

Il y avait un expert « Death » dans le lycée. Il – « Nicolas of Death » - était à la pointe de l’actu, n’achetait que ça et avait tout revendu pour choper les nouveautés en import. Il semblait avoir digéré « le truc » au point d’être capable de justifier un Top 10 des meilleurs albums (en 1994 et avec du CYNIC et du PESTILENCE dedans) et il faisait la différence entre le Grind et le Death. Du coup, Nicolas of Death était LA référence du coin, l’expert es « Mort Metal » qui acceptait parfois de vous prêter un album, faisait les copies sur K7 en délivrant à dose homéopathique les vérités qui éclairent les lanternes des kilomètres à la ronde. Il avait parole d’évangile et nous l’écoutions tous très sagement quand du bout des lèvres il évoquait des groupes comme ATHEIST ou BOLT THROWER.

En terme d’impact, ce "Crimson" se situait à quelques encablures du "Focus" de CYNIC. L’album n’était pas encore sorti que les mags en parlaient déjà comme d’un OVNI, une nouvelle référence du genre, une expérience unique dans le creux du phénomène. Imaginez : un des groupes de Death les plus prometteurs qui se lance dans un titre unique, à tiroirs, de 40 minutes avec des passages acoustiques etc. Bref, c’était déjà « culte » avant même d’être sorti. Et le Nico du lycée en parlait depuis des mois, il l’avait acheté en précommande et on crevait tous d’être à sa place le jour « j » de la sortie. Dire que "Crimson" était attendu serait un euphémisme : il avait été espéré, fantasmé et aimé avant même d’être consommé.

Le premier retour qu’il en fit était aussi excitant que prometteur. Nous étions une dizaine à l’entourer à la pause, à guetter ses premiers mots tandis qu’il tirait nonchalamment sur sa clope. Ce EDGE OF SANITY rentrait directement dans le Top 5 des meilleurs albums de Death. Peut-être même dans son Top 3 perso, c’est dire. "Crimson" dégageait une telle décharge d’émotions qu’il en avait presque pleuré. Même sa mère (qui était fan de Jean-Jacques GOLDMAN) avait été sciée par la beauté évidente de l’album, c’est pour dire. Dans les jours qui suivirent, ce bon vieux Nico fit monter les enchères comme jamais. Il copiait l’album sur K7 au compte-goutte, il refusait d’amener le CD original au lycée de peur qu’on l’abime et la question que se posaient les personnes qui avaient écouté "Crimson" était de savoir si EDGE OF SANITY n’avait pas fait encore plus fort que MORBID ANGEL avec "Blessed are the sick".

Quand finalement j’obtins une copie de ce "Crimson" (je vous passe les détails), je dois avouer que je fus un brin déçu. Quand on espère trop, la réalité fait toujours un peu mal. Force est de reconnaître que EDGE OF SANITY a réussi son coup. Même avec le recul des années, l’album reste une pièce maîtresse du dispositif, un OVNI aussi original que recherché. De fait, l’album se situe tout en haut dans la hiérarchie nobiliaire du Death, mais pas tout en haut, pas « aussi haut ».

Je m’explique.

Déjà pour commencer, l’unicité est un prétexte. "Crimson" n’est juste qu’un gros titre à tiroirs, une œuvre avec des variations, qui fait des va et vient plus ou moins heureux. Quoique certains en disent, EDGE OF SANITY n’a pas pondu « d’opéra Death ultime » et ce n’est pas non plus une œuvre magique et transcendante au point de faire pleurer une pauvre fan de Jean-Jacques (GOLDMAN). Non, "Crimson" n’est juste qu’une adaptation intéressante d’un même thème musical dont on a fait en sorte qu’il dure une quarantaine de minutes. Cette nuance importante ne retire en rien les qualités de cette œuvre aussi originale que puissante, mais fallait que ce soit dit.

Mais rien que pour cette volonté mélodique – quitte à se perdre maladroitement dans l’acoustique éthéré (avec les chœurs un peu chiants) – "Crimson" mérite le respect car elle tranche littéralement avec ce qui se pratiquait alors au sein du Death Metal florissant. Aucun groupe de Death n’avait encore emmené le genre sur ce terrain-là, ni n’avait réussi à produire un tel effet, à laisser de telles sensations s’insinuer dans votre esprit lors de son écoute. On avait été cloué par MORBID ANGEL, on avait rigolé avec DEICIDE, on avait chié dans son froc avec CYNIC… mais on avait encore jamais été à la fois séduit et intrigué, charmé toute en puissance, inquiété puis secoué.

En 1996, EDGE OF SANITY cherche, se pose les bonnes questions et pose les jalons de ce que seront plus tard les IN FLAMES et autres DARK TRANQUILITY de demain. Soit une brèche vivifiante, un appel d’air bienvenu dans un genre qui a fait de la suffocation une de ses caractéristiques principales. Le fait est que cette mélodicité rend meilleur. Cette envie de Beau dans le putride permet de comprendre, de mesurer, de se repérer par effet d’un contraste saisissant. Alors ces 40 minutes de Death torturé, alambiqué mais fascinant passent vite sans que l’ennui nous gagne un instant. On a juste envie de réécouter la chose pour un peu mieux la cerner.


Pas parfait donc. Mais culte, certainement.


Note : 4/5.


Morceau préféré : AH AH AH AH...
(sinon pour répondre sérieusement j’aime bien le passage à 18’, très chouette l’acoustique et tout le bazar).

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- Dan Swanö (presque tout)
- Andreas Axelsson (guitare)
- Sami Nerberg (guitare)
- Benny Larsson (batterie)
- Anders Lindberg (basse)


1. Crimson



             



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