Parmi les définitions métalliques les plus difficiles à cerner, le Thrash figure bien en haut de la liste. C'est vrai quoi, juste en prenant des exemples de groupe le pratiquant, tels que SEPULTURA, SLAYER ou REVOCATION, on voit bien que le genre s'éparpille comme aucun autre. Le Thrash, c'est pas le Doom, il a souvent bon dos le caméléon et vient bluffer les néophytes avec ses nombreuses chapelles.

REVOCATION n'appartient pas à l'écurie des violents bien qu'il hurle et déboule comme une avalanche, non, son Thrash est malgré tout festif. Il s'acoquine avec un Hardcore doucereux, un Death que l'on voudrait suédois, mais pas un Black moderne étouffant et revendicateur. Bon, le groupe s'approprie l'étiquette de Thrash/Death technique (ce qui peut être vrai dans une certaine mesure), mais qui ne prend pas toujours le pas. Le groupe se fait plus intello sur quelques morceaux comme le title-track, "Dissolution Ritual", "Fractal Entity" ou "The Watchers" et ce bridge clownesque avant un solo de la mort, mais je le répète, sous leurs ambitions de refonte, les Américains consolident un Thrash happy aux muscles de béton (forme) et à la folie passagère (fond). Voici là la meilleure définition que je ne ferai jamais de ce combo, alors soulignez-la au crayon fluorescent.

Je pourrais ajouter un élément à cette interprétation, outre le terme "recherché" à côté de Thrash : machine à tubes. Vous aurez deviné à la note qu'on ne s'ennuie pas vraiment sur ce "Chaos Of Forms", intitulé on ne peut plus représentatif de la substance nourricière de l'opus. C'est véritablement le chaos, le quatuor essaie d'emprunter le plus de formes possibles et c'est exactement cette hyperactivité, ce mélange de old Thrash pour les vieux briscards et de Thrash shooté aux hallucinations techniques, voire prog pour ne pas me répéter, qui rend REVOCATION si irrésistible… et déjanté (autant au niveau de la musique que des textes). Toujours chaud comme un fer dont on ne lasse pas de battre, une fille qu'on baiserait tous les soirs jusqu'à ce que le temps fasse son effet. Les Bostonnais savent se faire apprécier et garder leur place près de nous durant une très longue période.

Et que produit-elle la machine à tubes ? Des fucking tubes, rien de moins, du début à la fin. Déjà, si le duo de départ "Cretin" et "Cradle Robber" ne vous allume pas, je ne donne pas cher de votre peau. Putain, ces refrains et ces rythmiques, ça vous donne pas envie de faire la fête en décapitant quelques bouteilles ? De la drogue, voilà ce que c'est. Ça défonce ici, ça ralentit là pour montrer que ça peut aussi émouvoir ou triturer les méninges, et ça reprend de plus belle dans une mitraillette mélodique contagieuse. Effets de guitare compris.

La réelle force derrière cette dithyrambe est le fait que REVOCATION ne se prenne pas une seconde au sérieux. Même quand il alourdit le ton (trop excellente "Conjuring The Cataclysm"), il s'amuse comme un fou. On ressent une telle énergie, une telle humanité (si c'est possible en Thrash ?!) à travers ce mur du son, une telle maîtrise du riff assassin… La dernière fois, c'était avec VEKTOR. Mais jamais n'avais-je retenu une telle simplicité dans la complexité, un tel potentiel fédérateur. REVOCATION se fait déjà beaucoup d'amis avec ce troisième album et je parie que sa fan base grandira exponentiellement au fil de ses sorties. Car ce qu'il offre n'est peut-être pas révolutionnaire, mais c'est tout sauf lancinant.

Cela faisait longtemps que je n'avais pris autant de plaisir à écouter du Thrash. Juste pour ça, REVOCATION mérite bien son 4/5 avec une envie non-dissimulée de se muter vers le 4,5. Chacun pourra choisir selon son degré d'appréciation, peu importe, ce qui est important est que ce combo voie enfin le jour sur NiME.

Une bien belle surprise que vous ne devez louper sous aucun prétexte.