Difficile de succéder à un album de la trempe « Blood Sugar Sex Magic » et je dois dire qu'à l'époque, je ne donnais pas cher de la peau de la bande à Chad Smith et Flea suite au départ en 1992 du guitariste aux soli hendrixiens John Frusciante. Mais là ou beaucoup d’autres à la même époque sont passés à côté (au hasard Guns & Roses voir dans une moindre mesure METALLICA), les Red Hot vont profiter de cet adversité pour sublimer leur musique en balançant à la face du monde un grand disque, certes non exempt de quelque défauts (comme certains titres de remplissage) mais d’une qualité rare pour un groupe ayant atteint ce niveau de starification.

Pour relever le challenge, il fallait un guitariste unique capable d’enflammer les tempos fusionnesques typiques des Red Hot. Et là, les gars ont frappé très fort en embauchant l’ancien guitariste de Jane’s Addiction (un temps pressenti pour épauler Slash de vous savez qui durant la tournée gargantuesque des deux « Use Your Illusion »), Dave Navarro. Ce dernier va énormément s’impliquer dans le processus d’écriture de ce disque marquant une véritable parenthèse musicale au sein de la carrière du groupe.

En effet, le funk dévastateur qui fit la gloire des californiens s’en trouve quelque peu délaissé au profit d’un univers sombre voire désenchanté ponctué d’orgasmiques giclées de wah-wah ( « Deep Kick », « One Music Mob ») au style abrupt qui ne sont pas sans rappeler le Joe Perry des grandes heures (ré-écoutez « Walk This Way » et vous comprendrez : effet garanti !).
« One Hot Minute » contient donc son lot de grands moments : « Aeroplane », avec sa rythmique frénétique et son solo de guitare aérien, demeure un tube imparable ; même punition avec la jolie balade « My Friends », « Transcending », l’une des plus belles mélodies jamais composées par le groupe et « Falling into Grace », un uppercut psyché-funk proche de ceux que pouvait concocter George Clinton dans les années 70.

A côté de ces classiques l’on trouve quelque petites perles ("coffee shop", "one big mob", "tearjeker" "walkabout") moins connues mais largement aussi jouissives. Toutefois pour être exhaustif, il faut souligner que quelques titres sont difficilement accrocheurs par leur (trop) grande originalité (voire bizarrerie : le single «warped » est franchement space… ), du coup, je me surprends quelquefois à jouer les zappeurs. Mais, malgré tout qui aime bien châtie bien et l’on peut facilement argumenter que si l’expérimentation qui a prévalu sur ce disque ne fonctionne pas à tous les coups, on ne peut que se féliciter d’une telle prise de risque de la part d’un groupe aussi installé.

Au final impossible de ne pas ce dire que l’on a entre les mains l'album le plus ambitieux des Red Hot Chili Peppers, dont le seul défaut est sa démesure, qui a terrassé les soi-disant fans. Ce disque est de la folie douce et le dernier album créatif des Red Hot Chili Peppers à ce jour.