TRANS-SIBERIAN ORCHESTRA, en voilà un nom bien mystérieux ! En fait, derrière ce patronyme intriguant, se cache un projet parallèle des musiciens de SAVATAGE, mis sur pied à l’origine pour célèbrer la nuit de Noël… mais avec ce troisième disque de la formation, on change totalement de registre ! Fini les comptes, oups, contes de Noël, et bienvenue à un concept album consacré à Beethoven. Je ne vous narrerai pas l’histoire, un riche et épais livret s’en chargeant avec moultes détails, mais sachez qu’il s’agit d’une histoire très intéressante tournant autour d’un pacte signé entre Beethoven et Mephistopheles au sujet de la dixième symphonie jamais achevée par le génial pianiste…

Nettement plus abouti que ses deux sympathiques prédécesseurs et porté par un sujet se prêtant plus à la majesté habituelle des compositions des musiciens du ‘TAGE, ce « Beethoven’s Last Night » est une petite merveille de musique, bien difficile à classer : les pianos (allons donc ?) y sont prédominants et dessinent de superbes décors, investis par une pléthore d’interprètes masculins et féminins qui se relaient pour interpréter les différents protagonistes de l’histoire. Les guitares se font discrètes mais sont belles et bien là, la batterie travaille à injecter un dynamisme bienvenu à l’ensemble, même si le tempo ne s’emballe jamais et se contente de faire défiler les images et émotions, de très nombreux emprunts à la musique classique parsemant cette œuvre magnifique (Mozart, Rimsky-Korsakow et… Beethoven).

Très vaguement Metal, absolument pas Hard Rock, « Beethoven’s Last Night » pourrait s’apparenter, à sa façon, à un opéra subtilement métallisé, destiné à un large public en quête d’une musique avant tout mélodieuse et touchante, parfois bouleversante (les interprètes possédant tous une voix personnelle et gorgée de passion, notamment Patti Russo qui interprète le personnage de Thérésa), superbement composé en tout cas, et digne du standing de musiciens aussi brillants que peuvent l’être ceux de SAVATAGE.

On aurait pu craindre une niaiserie pop, une sorte de comédie musicale boursoufflée de lourdeur et emballée de ficelles énormes. Il n’en est rien, et l’on se délecte avec joie d’un met artistique équilibré, mesuré et intimiste quand le déroulement de l’histoire le nécessite, humble mais majestueux dans ses hommages à la musique classique, et profondément émouvant aux instants les plus tragiques.

L’exercice du concept album est toujours quelque chose de périlleux, et se frotter au Grand Beethoven relevait du défi. TRANS-SIBERIAN ORCHESTRA s’y est risqué, avec un brio et une modestie qui illumine ces soixante treize minutes de musique qui raviront tous les fans de SAVATAGE et de musique orchestrale riche et théâtrale. Un disque aussi magique que sa splendide pochette signée Edgar Jerins.