L’année 1994 fut celle du Punk. Pas du Punk cradingue à la SEX PISTOLS ou à la RAMONES, celui que les nostalgiques taxent forcément de True Punk. Non, celui du Punk un peu plus propre sur lui, bien déconnant et quelque peu vendu à MTV si l’on en croit les clips qui étaient largement diffusés à cette époque. C’est l’année de "Smash", de "Dookie", de "Punk In Drublic", de "Stranger Than Fiction" ou encore de "Let’s Go", des excellents ouvrages, voire des chefs d’œuvres qui nous viennent tout droit des USA. L’Angleterre ne cherchait même pas à rivaliser, mais l’Irlande, elle n’a pas hésité une seconde et à dégainé le "Troublegum" de THERAPY?, une autre madeleine de Proust de cette année, mais que l’on peut-être tendance à un peu oublier de nos jours.

D’ailleurs, aujourd’hui, on est surpris quand on découvre que THERAPY? existe toujours et qu’il continue de sortir des albums. Mais ce n’est plus la même chose. Des groupes cités plus haut, il n’y a guère plus que GREEN DAY et OFFSPRING à être encore capable de provoquer un réel intérêt médiatique à chaque nouvelle génération et cela reste d’ailleurs particulièrement vrai pour le premier cité. Mais THERAPY? ? (Ah oui, fait iech ce point d’interrogation). Pour les Irlandais, tout s’est écroulé non pas après "Troublegum", mais après "Infernal Love", qui les voyait proposer des choses plus nuancées, plus sobres, tout en gardant un esprit Punk/Metal bien sympathique. Il s’agit vraisemblablement du dernier grand disque du groupe, bien qu’il aurait divisé les foules quand "Semi-Detached" les aura fait disparaitre pour le commun des mortels.

Aujourd’hui, THERAPY? est de retour avec "Hard Cold Fire", cinq ans après "Cleave", qui tentait d’entretenir la légende du mieux qu’il le pouvait. Et autant vous dire que l’annonce d’un nouvel album m’a mis en joie, surtout après une telle absence, ce qui explique pourquoi, au final, je suis déçu. Pas amèrement déçu, du genre à hurler à la lune et à péter le 1/5 lapidaire par basse vengeance personnelle, non, plutôt déçu du genre « tout ça pour ça ». Évidemment, je n’attends pas de THERAPY? une révolution nette et sans bavure à chaque nouvel opus, mais avec le temps qui s’est écoulé, je m’attendais à mieux.

Après, l’album ne commence pas si mal avec un "They Shoot In The Terrible Master" qui possède un riff assez plombé. Un petit mid tempo au refrain bien envoyé, mais qui donne l’impression qu’Andy Cairns est un peu à la peine vocalement, qu’il se contente d’une sobriété un peu étrange. Tout le temps on attend qu’il envoie la sauce, mais il reste plutôt posé, ce qui sera un des signes distinctifs de cet album. Et surtout, ce titre semble servir de mètre-étalon pour le reste du disque, qui va être très, trop homogène. C’est simple, si vous laissez vagabonder votre esprit quelques instants, vous serez étonné d’être passé de la seconde à la septième piste tant tout cela reste très proche musicalement.

Bien sûr, certains titres vont sortir du lot, comme "Joy" (bien qu’un peu simpliste par moments et ne sachant clairement pas quel parti prendre, sa phase la plus agressive étant plus un prétexte qu’un véritable élan). "Days Kollaps" fera ressortir quelques vieilles influences façon NIRVANA, pas désagréable pour un sou et j’avoue que "Ugly" me plaît plutôt bien même si là encore il n’y a pas grand-chose de bien neuf. THERAPY? donne l’impression de se recycler, ce qui est l’apanage de nombreuses formations, certes, mais qu’il ne le fait pas toujours avec application. Ce disque ressemble plus à un prétexte pour repartir en tournée, avec quelques bons morceaux qui surnagent et qui seront là pour rappeler qu’il y a du nouveau matériel, quand tout le monde attend gentiment les "Nowhere" et autres" Screamager".

"Hard Cold Fire" n’est pas du misérabilisme musical, ce n’est pas un baroud d’honneur de vétérans d’une scène qui jadis fut bien plus resplendissante – en tout cas l’envie qui devrait s’en dégager ne se fait pas sentir. Il est l’image d’un groupe qui sait que le meilleur est définitivement derrière lui. De ce point de vue, la bande à Cairns est honnête : elle ne tente pas de recopier son glorieux passé, elle produit des chansons entre Punk et Metal plus ou moins réussies, au gré d’une aspiration qui donne l’impression d’être en réalité un après-midi d’écriture tant le style ne varie pas des masses ici. Le disque demande de nombreuses écoutes pour être pleinement assimilé, pour que ses richesses soient dévoilées, même s’il manque clairement un truc pour être plus motivant.

La bonne nouvelle, c’est que THERAPY? existe toujours, que le groupe est là, qu’il a décidé de renouer avec le côté sec et Heavy de sa musique, comme à la grande époque en se respectant assez pour ne pas tenter de se singer. Personne n’était vraiment dupe en 1994. "Troublegum" avait tout de l’album coup de chance et le groupe n’arriverait jamais à renouveler son exploit. Il continue de se challenger malgré tout et ça, ça fait plaisir. Avec une intégrité rare, les Irlandais sortent toujours de l’ornière avec un nouveau disque souvent salué par la critique outre-Manche, un peu moins dans nos contrées. THERAPY?, c’est le groupe de quelques albums, mais que l’on retrouve toutefois toujours avec un certain plaisir même si parfois, la déception est de mise.

Note réelle : 2,5/5.