À ce jour, on ignore encore si l'humour de "Lavatory" était juste potache ou réellement empreint d'un second degré oscillant entre satire et insolence. Aussi médiocre soit-il, l'E.P. de WOMBBATH génère un certain nombre de questions auxquelles nous allons essayer de répondre. La première étant la suivante : pourquoi le groupe suédois, fraîchement auréolé d'un contrat avec Napalm Records, a-t-il choisi de balancer un disque aussi merdique à la face du label et de son public ? Parce que malgré les roses et la bouteille, peut-être destinés à fêter la signature avec Napalm, c'est bel et bien sur un chiotte et entourés de papier cul que lesdits objets trônent.

La petite histoire retiendrait - le conditionnel reste de mise - de sérieux désaccords entre la formation et son label, poussant le quintette à torcher en deux coups de cuillère à pot de chambre un petit étron d'à peine plus d'un quart d'heure, afin de se libérer du contrat. Un contrat de merde, donc, qui serait dénoncé au travers des titres des morceaux et de leurs paroles. "Descent Into A Maelstrom" ne ferait-il pas référence au destin de la crotte qui, dignement expulsée au fond de la cuvette, finit absorbée par un inexorable tourbillon, sans qu'elle imagine un instant son destin, "without knowing anything" comme le chante Daniel Samuelsson ? La crotte, c'est WOMBBATH tout entier, englouti dans une situation qu'il ne souhaitait pas.

Quant à "Lies After Cries Of Hope", ne renvoie-t-il pas à l'espoir déçu du combo vis-à-vis de sa relation avec Napalm Records, ces "mensonges après des pleurs d'espoir" pouvant évoquer, pourquoi pas, les chimères agitées par le label devant les yeux brillants des membres de WOMBBATH ? Et "Lavatory Suicide Remains" n'est-il pas une réflexion du groupe lui-même par rapport à sa démarche avec cet E.P, suicidaire à bien des égards ? Mettre volontairement fin à sa carrière artistique - car le split arrivera un an plus tard - au fin fond de toilettes miteuses illustre à merveille, en effet, le destin du groupe en cette année 1994.

Serait-ce finalement la nouvelle mode du Death'N'Roll initiée par ENTOMBED quelques mois plus tôt qui a sonné le glas tout à la fois de cette relation contractuelle et de la carrière de WOMBBATH ? Car c'est bien à ce genre-là que le groupe suédois s'essaie sur cet E.P, probablement à contrecœur, d'ailleurs. Parce qu'à l'ouï et au su de ce que fut la musique de WOMBBATH avant "Lavatory" et de ce qu'elle sera après, une fois le quintette reformé vingt ans plus tard, difficile d'affirmer de façon catégorique que ce tournant Death'N'Roll était 100% désiré et assumé par le combo. L'on pourrait d'ailleurs lire plusieurs des titres de ce disque comme des critiques de cette récente tendance.

Jugez plutôt : "Descent Into A Maelstrom" pourrait tout autant équivaloir à l'impression qu'avaient les membres de WOMBBATH à l'idée de se jeter dans l'incertaine et clivante mode du Death'N'Roll. Et si tant est que les quatre musiciens considèrent ledit genre comme de la merde, il va de soi qu'ils aient le sentiment de commettre un "Lavatory Suicide". Et ce "Laughter Through Thousand Winds" n'est-il pas finalement qu'un rire jaune au beau milieu de mille pets sonores émis par tous ceux qui se sont mis au Death'N'Roll ? Parce qu'il y a bien un indice de l'appréciation réelle qu'a, du genre, la formation suédoise : elle en joue totalement par-dessus la jambe et semble se foutre de satisfaire qui que ce soit en la matière, ni label, ni auditoire.

En effet, ce qu'on entend sur "Lavatory" n'est qu'une insincère tentative de sonner Death'N'Roll pour faire plaisir à quelques-uns, sauf aux membres du groupe eux-mêmes. Il faut dire qu'en réalité, la musique de WOMBBATH sur cet E.P. n'est ni Death, ni vraiment Roll non plus. On a plutôt droit à des riffs tantôt Heavy, tantôt Punk voire Hardcore, avec les patterns de batterie idoines et quelques breaks qui vont bien. Seule la basse de Richard Lagberg est réellement digne de l'influence Rock'N'Roll. Heureusement, on l'entend beaucoup et c'est surtout elle, et rien de plus, qui rend l'écoute un tant soit peu intéressante. Car, que ce soit au rayon Heavy ou au rayon Punk, rien d'autre n'a d'intérêt sur "Lavatory".

Et quand je dis "rien d'autre", j'inclus les vocaux ineptes du nouveau venu, Daniel Samuelsson, sans dynamisme en chant clair et sans véritable growl non plus, puisque sa voix saturée tient plus d'un hurlement de chanteur de Thrash Crossover. Seuls les gang vocals manquent réellement à l'appel pour qu'ils remplissent toutes les conditions de ce style de chant. Tout juste peut-on reconnaître à Samuelsson la tentative de retourner aux tout premiers disques de Death Metal lorsqu'il se met enfin à growler un minimum, sur "Lavatory Suicide Remains". Mais au-delà de ça, sa performance n'aide pas WOMBBATH à sortir la tête haute de cette plaisanterie qu'est "Lavatory".

Toutefois, si WOMBBATH n'aimait ni le contrat qui le liait à Napalm Records, ni le Death'N'Roll, peut-être a-t-il eu raison de la faire, cette plaisanterie ? Au moins, ni l'un, ni l'autre n'aurait plus jamais droit de cité dans sa musique après cela.