Longtemps lecteur assidu du Journal de Spirou, je me souviens d'heures de plaisir à lire les aventures des Tuniques Bleues, cette série scénarisée par le prolifique Raoul Cauvin et qui narre les aventures du Caporal Blutch et du Sergent Chesterfield, deux bras cassés jetés dans l'enfer de la Guerre de Sécession. Cette série humoristique a, au fil des ans et particulièrement sur ses derniers albums, grandement perdu en qualité, la cause à certaines facilités et déconvenues scénaristiques qui témoignent d'un certain essoufflement. Vous voyez où je veux en venir, au moment d'aborder le cas de ce nouvel album de CIVIL WAR, dont la pochette présente (comme celle de l'opus précédent) une scène de bataille entre soldats confédérés et soldats de l'Union.

Non pas que ce "Last Full Measure" soit indigent ou témoigne d'une baisse de régime de la part des dissidents de SABATON. Le Heavy Metal grandiloquent et épique proposé par le groupe est toujours de bonne qualité, et si l'effet de surprise est maintenant passé, on apprécie toujours autant ce mélange réussi entre les guitares acérées, les claviers imposants et le chant toujours très marqué "Dio" de Nils Patrik Johansson, qui semble désormais bien plus à l'aise à interpréter les lignes de chant virevoltantes de CIVIL WAR que celles de ASTRAL DOORS qui devient de moins en moins son groupe principal. Il y a ici quelques moments de bravoure, à l'image du morceau-titre qui est quasiment le seul à proposer un solo de guitare véritablement inventif, la six-cordes se "contentant" sur le reste de l'opus de reprendre une mélodie principal ou de répondre aux claviers.

Comme son prédécesseur direct, l'album se fait varié dans les tempi. Le groupe fait parler la poudre avec une certaine réussite ("Road To Victory", "Gladiator"), et soigne ses ambiances belliqueuses. On plonge dans la bataille et on apprécie également ces passages épiques, émaillés de nombreux changements de tempo, qui émaillent certains titres à l'image des splendides "Deliverance" et "America". Mais, à côté de cela, le retour en grandes pompes des claviers donne naissance à certains morceaux un peu trop pompeux et kitsch pour être honnête. Il en va ainsi du morceau qui a fait l'objet d'un clip (lui-aussi très kitsch), "Tombstone", sorte de Polka-Metal (n'est pas KORPIKLAANI qui veut) autant surprenant que décevant, tout de même sauvé par un refrain efficace. Et puis, les titres qui se veulent morceaux de bravoure (à l'image de "A Tale That Should Never Be Told" sentent un peu la redite, et peinent à s'envoler. Si le groupe ne démérite pas, il n'égale pas le niveau de ses précédentes réalisations, c'est une évidence.

Tant et si bien que, si l'on apprécie cette nouvelle offrande des CIVIL WAR, on se demande après quelques écoute ce qu'il va en rester dans quelques mois. Le morceau-titre, sans doute, et quelques brûlots qui confirment, si cela était nécessaire, que CIVIL WAR reste capable du meilleur. Un album que les novices et les fans apprécieront, c'est certain, tant il est fidèle à l'identité du groupe, mais qui reste un cran en-dessous de ses deux glorieux prédécesseurs.