Quatrième album de BORKNAGAR en cinq ans, "Quintessence" est sorti un an et demi après l'excellent "The Archaic Course", que plusieurs considèrent encore comme leur plus grande réussite. Est-ce que dix-huit mois auront été nécessaires pour répéter l'exploit ou le bogue de l'An 2000 aura-t-il frappé les zicos viking de plein fouet ? Je vote pour le second énoncé…

"Quintessence" est de façon globale une réelle déception : inégal comparativement à son prédécesseur et moins pêchu que son successeur le sera. De "The Archaic Course", il a gardé le son un peu moisi, organique, si cher et parfait collant à la musique des Norvégiens. "Empiricism" sera la continuité de ces airs accrocheurs tels que "The Presence Is Ominous" et ses lignes de chant choral absolument irrésistibles. Je ne m'en lasse pas.

Et que dire de "Ruins Of The Future" et "Genesis Torn" avec leurs riffs couillus et leur batterie monstrueuse ? Encore des embryons qui écloront sur "Empiricism". Dommage par contre qu'on entende si mal le synthé. On doit attendre aux bridges bien souvent pour s'y abreuver. Mais Nedland s'est gardé un petit moment sous le gros projecteur sur "Inner Landscape", la pièce instrumentale incontournable de BORKNAGAR. Et elle est très spéciale… enfin, meilleure qu'"Embers", qui est une véritable perte de temps et d'espace ! Notons aussi sa ligne catchy sur "Invincible". À part ça, le quasi néant, embué par une production très moyenne.

L'impression générale qui se dégage de "Quintessence" n'est justement pas la « quintessence » du potentiel du groupe. Je n'ose presque pas les étiqueter Viking Metal, car l'halo folk timide qui semble planer sur les autres skeuds semble être mort-né cette fois. Seul l'épique "Genesis Torn" et les entraînantes "The Presence Is Ominous" et "Colossus" laissent le doute planer. Mais encore… L'atmosphère brouillonne de l'album n'est pas à la hauteur de la réputation des Norvégiens et de la tâche qu'ils devaient accomplir. On dirait qu'ils ont manqué de temps… ou de jus. Heureusement qu'ils se reprendront par la suite !

"Quintessence" est aussi le deuxième et dernier album sur lequel Vortex s'égosillera. S'il ne fait pas l'unanimité en tant que gueulard solo, il est tout même un sacré vocaliste. Son goitre, ici plus gras et modifié que lorsqu'il officie en tant que second violon, s'avère efficace et glace tout sur son passage comme un souffle cryogénique. N'oublions pas que "Quintessence" date de 2000 et qu'à cette date, Simen n'avait pas offert ses meilleures performances encore en tant que leader au micro. En tout cas, c'est drôle de songer que ce gros bonhomme à l'air bourru, mais doux comme un agneau, soit capable de grogner quand on est habitué d'entendre ses planants interludes ou ses intonations lunaires d'une clarté laiteuse comme sur "Colossus".

Or, bien qu'il soit doué, il n'arrive pas à sauver "Quintessence" du marasme. Trois étoiles pour un BORKNAGAR et une si petite chronique ?! Eh oui, et je suis généreux. Si vous surfez un peu, vous verrez que "Quintessence" en a déçu plusieurs. La claque est si faible qu'il ne sert à rien d'en redemander en hurlant comme un chien battu.